Bien faire à s’en rendre malade
Dans le langage courant, le perfectionniste désigne une personne qui aime les choses bien faites. Ce qui est plutôt une qualité. De grands artistes étaient perfectionnistes, comme Léonard de Vinci, qui apporta toute sa vie des améliorations à ses toiles. Les scientifiques aussi sont consciencieux dans leurs recherches et la mise au point de leurs protocoles, tout comme les médecins dans l’établissement de leurs diagnostics. On parle alors de perfectionnistes «réussis», à même de retirer une sensation de plaisir du travail exigé par un grand effort. Et puis, il y a les perfectionnistes qui glissent vers la névrose et peinent à trouver satisfaction dans leurs tâches. Ils intéressent déjà la médecine, explique le psychiatre Jacques Besson, professeur honoraire à l’Université de Lausanne. Un autre type de patients présente des traits de personnalité permanents, acquis dans l’enfance et l’adolescence. Face à leurs troubles anxieux, ils cherchent à garder le contrôle, prennent des précautions, vérifient tout et culpabilisent en permanence. Ce trouble de la personnalité engendre une souffrance pour le sujet. Mais il peut aussi être pénible pour son entourage.
Religieux aussi concernés
Enfin, le véritable diagnostic psychiatrique est posé en cas de troubles obsessionnels compulsifs (TOC). Avec l’anxiété généralisée, les phobies, les attaques de panique et les états de stress post-traumatique, ils font partie des troubles anxieux. Les TOC se caractérisent par des comportements répétitifs et irraisonnés, mais irrépressibles. Ainsi, un patient peut se laver les mains jusqu’à les abîmer, explique Jacques Besson. Le trouble est alors considéré comme sévère et handicapant. Et d’ailleurs, les personnes religieuses ne sont pas épargnées. Certains peuvent par exemple enchaîner toute la journée génuflexions et prières. D’autres auront l’obsession de la possession diabolique ou des mauvais esprits.
Heureusement , des traitements existent pour apaiser les tendances au perfectionnisme maladif. La psychothérapie soulage l’anxiété et les obsessions. L’imagerie cérébrale permet de repérer dans les circuits cérébraux les dysfonctionnements qui justifient la prise de médicaments. Autre méthode, plus holistique, la méditation a également fait sa place en psychiatrie et en psychothérapie. Elle est efficace pour faciliter le lâcher-prise, contrer la volonté de contrôle, l’omniprésence de préoccupations ainsi que les mécanismes d’automatisation qui caractérisent les troubles anxieux, relève le professeur.
Si l’angoisse ordinaire fait depuis toujours partie de la condition humaine, elle prend d’autres proportions dans cette société sécularisée et désenchantée où il est souvent impossible de correspondre aux idéaux de richesse, de succès et de beauté, constate Jacques Besson. En nous basant sur des valeurs telles que la solidarité et la fraternité, l’auto-distanciation et l’auto-transcendance, nous sommes capables de dépasser notre cerveau automatique. Il est parfois possible de le faire seul ou de demander de l’aide à un médecin, à un psychothérapeute ou à une personne spirituelle, voire à un pasteur…