Pub et promotion : l’Eglise est-elle encore vendable ?

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Pub et promotion : l’Eglise est-elle encore vendable ?

22 avril 2003
Peu porteuse, vieillie, l’institution protestante cherche pourtant sa voie dans la promotion et les campagnes de communication
À Lausanne et Genève, les milieux concernés cherchent le déclic qui les rendra visibles. Mission impossible ? Enquête auprès des professionnels de la publicité.Ce sera certainement la perle rare. L’Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) est en pleine phase de recrutement pour désigner un chargé de promotion sur le plan cantonal, appelé à entrer en fonction dès juillet. L’objectif, à terme, étant de mettre en place une équipe, un théologien et un professionnel de la pub, pour assumer la promotion du label de l’Eglise cette année encore. « L’Eglise n’est pas une entreprise, précise Jean Chollet, directeur du Théâtre du Jorat et président du Conseil information et dialogue, mais en tenant à faire de la promotion, on ne veut pas simplement vendre des activités mais aussi affiner la perception des attentes du public ». Une démarche qui va faire monter la tension entre la discrétion réformée habituelle et une visibilité à gagner dans le grand public. Reste que tout est à inventer.

§Professionnels sceptiques Mais l’Eglise en tant qu’institution est-elle encore vendable ? Réponse d’un professionnel de la communication : « Le produit est tellement vieux, admet Jean-Henri Francfort, de l’agence Francfort communication, qu’il s’est coupé du public et il semble difficile d’arriver à combler ce déficit ». Le spécialiste met en garde contre toute campagne qui aurait tendance à faire « des sur-promesses », c’est-à-dire à utiliser des slogans qui rejoignent le public mais sans que le service suive à la hauteur de ce qui est annoncé.

« Communiquer sur la religion ou l’Eglise, c’est une affaire ardue, difficilement porteuse, reconnaît Maurice Pasquier de l’agence Noir Mat. Ce qui fait défaut la plupart du temps, c’est un sujet. « En fait, il manque un branding, autrement dit une marque protestante, affirme Maurice Pasquier. Rendre l’Eglise visible, oui, mais pourquoi, dans quel but ? La plupart du temps, ces aspects-là ne sont pas suffisamment clarifiés, ou alors dilués dans un consensus qui affaiblit la portée du message.

§Protestants à la traîneÀ Genève pourtant, l’Eglise catholique romaine a fait mouche avec une campagne de communication pour parler de son besoin de soutien financier sur un ton résolument cynique –« En 2016, il n’y aura peut-être plus de prêtres à Genève pour célébrer les enterrements, mais c’est pas grave, à la fin du film le héros ne meurt jamais… » . La campagne, faite dans les règles de l’art, a rapporté pas moins de 1.6 million (voir encadré). Côté protestant, on ne cache pas que les besoins d’une réelle promotion financière mettent une certaine pression sur les responsables. Jöel Stroudinsky, président du Conseil de l’Eglise protestante de Genève, annonce que l’institution, en proie à de nouvelles adaptations financières, s’apprête à diffuser quatre dépliants sur la question du coût des actes ecclésiastiques (baptême, mariage, accompagnement, service funèbre). Ce dernier regrette pourtant que la campagne de communication menée par les catholiques romains n’ait pas pu se faire sur une base multiconfessionnelle. « Une telle campagne dans la presse devrait se faire au nom des trois Eglises reconnues, catholique, catholique chrétienne et protestante », déplore-t-il. Les protestants genevois doivent donc plancher seuls sur le concept d’une future campagne d’images par voie d’affichage dans les bus et les cinémas.« Des agences ont été consultées » assure-t-on. Avec l’exemple précédent, la barre est désormais fixée assez haut.