Selon un historien de l’art, le blasphème est un droit humain fondamental

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Selon un historien de l’art, le blasphème est un droit humain fondamental

1 juin 2017
Si l’on ne tolère plus que l’on se moque de Dieu ou des croyants, on met en danger la liberté de culte. Un chercheur invite les Eglises à défendre le droit au blasphème.

Image: Madame Anastasie, dessinée par André Gill, est une caricature de la censure. La chouette qui l'accompagne symbolise les croyances obscures. Publié en une de «L’Eclipse» le 19 juillet 1874

Hambourg (EPD/Protestinter). D’après Andreas Mertin, historien de l’art issu de Hagen, la satire et le blasphème représentent des «droits humains fondamentaux». Les personnes religieuses elles-mêmes doivent tout particulièrement les défendre, car elles se voient en contrepartie assurer un autre droit fondamental: la liberté de culte, a déclaré Andrea Mertin mi-mai, lors d’un congrès de l’Académie protestante de l’Eglise du Nord consacré au blasphème.

Ce n’est pas par hasard que le respect des droits de l’homme et de la liberté de culte n’est justement pas garanti dans les pays qui promeuvent la censure de prétendus blasphèmes, voire des punitions à leur encontre. L’idée de blasphème a évolué au fil de l’histoire, a déclaré le chercheur.

Alors qu’au départ, c’est une attaque directe envers Dieu qu’on aurait considérée comme une infraction, la notion s’est ensuite étendue aux atteintes à l’ordre public, et même aujourd’hui à toute injure envers le sentiment religieux d’un autre. «Toute personne a le droit de se moquer des sentiments religieux d’une autre», a insisté l’historien de l’art. On peut considérer qu’une telle attitude manque de goût ou d’intelligence — mais une interdiction de ce type d’expressions aurait des conséquences autrement plus dangereuses, et entraînerait une montée de l’hostilité envers la religion.

«La liberté d’opinion, dans sa dimension très large, protège aussi la religion.» C’est aussi le cas des platitudes, des impertinences et des «concentrés d’absurdités»: «L’idiotie, l’absence de réflexion et l’impertinence aussi sont des droits humains, qu’il faut défendre avec raison.»

C’est souvent l’art qui se voit exposé à des accusations de blasphème. Andreas Mertin a cité pour exemple les caricatures de Mahomet. Néanmoins, les artistes doivent pouvoir compter sur les Eglises chrétiennes et l’ensemble de la société libre pour défendre fortement et résolument la liberté d’opinion et d’expression par l’art — même lorsqu’elles ne partagent pas les opinions en question. Quiconque se sent malgré tout atteint dans son sentiment religieux doit, dans une société éclairée, passer par la justice. C’est ainsi que la société clarifie ce qui est permis ou pas.

Sous l’intitulé «Blasphème et satire», le congrès de l’Académie protestante de l’Eglise du Nord s’est penché sur la question des limites de la satire et de la moquerie dans le cadre de l’Eglise et de la théologie. Ce débat s’est appuyé sur la «farce de Luther», qui a provoqué en 1983 un énorme scandale dans ce qui était alors l’Eglise du nord de l’Elbe. En 1986, à l’issue d’une procédure de presque trois ans, deux avertissements et trois blâmes ont été prononcés par la «chambre de discipline ecclésiastique» contre les responsables en charge de cette pièce de théâtre bouffonne.