Débat sur les baptêmes de réfugiés

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Débat sur les baptêmes de réfugiés

12 juin 2017
Après une agression mortelle commise par un converti, un évêque réclame des contrôles approfondis. La conversion peut-être utilisée pour éviter une expulsion vers des pays où les apostats risquent des représailles.

Photo: Un baptistère CC(by-sa) Stanze

Hanovre/Karlruhe (EPD/Protestinter). Une agression mortelle commise par un converti afghan a déclenché un débat sur les baptêmes de demandeurs d’asile. Mercredi, Ralf Meister, évêque régional hanovrien, a appelé l’Eglise à un contrôle approfondi des réfugiés désireux de se convertir à la religion chrétienne. L’Association des fonctionnaires de la police judiciaire allemande a exprimé un scepticisme de principe envers les baptêmes de réfugiés musulmans. Jürgen Blechinger, spécialiste ecclésiastique de la question des réfugiés, a balayé la critique selon laquelle les demandeurs d’asile seraient baptisés de façon trop précipitée en Allemagne.

Début juin, un demandeur d’asile afghan a poignardé à mort un petit garçon de cinq ans dans un centre d’accueil pour réfugiés de Bavière. L’agresseur a ensuite été abattu par la police. Ce délinquant déjà condamné s’était converti plusieurs années auparavant à la foi chrétienne, et avait réussi à s’appuyer sur cet argument pour éviter une expulsion vers l’Afghanistan. D’après l’évêque Ralf Meister, il est indispensable de connaître avec exactitude la situation actuelle de l’aspirant au baptême. Néanmoins, «même lorsque le désir de baptême des réfugiés est traité avec la plus grande vigilance, on ne peut exclure que dans des cas particuliers, des abus puissent être commis», a déclaré ce théologien protestant.

Les sanctions ne seraient alors pas du ressort de l’Eglise, mais de l’Etat. Il est de la responsabilité des cours de justice étatiques d’agir résolument contre cette forme d’abus. «L’existence de baptêmes abusifs et basés sur un abus de confiance ne peut être tolérée», a déclaré Ralf Meister au «RedaktionsNetzwerk» (réseau des rédactions allemandes – RND).

Une combine pour rester dans le pays

Ulf Küch, président adjoint de l’Association des fonctionnaires de la police judiciaire allemande, considère les conversions au christianisme de réfugiés musulmans comme «une combine visant à pouvoir rester dans le pays». «Les musulmans n’ont pas le droit de changer de foi», a affirmé Küch au journal du groupe de médias Funke Mediengruppe. Il en faut réellement beaucoup pour que des musulmans abandonnent leur religion. «Lorsque l’expulsion d’un délinquant est empêchée du fait de sa conversion, alors il est très facile d’en tirer des conclusions.» A contrario, le juriste Jürgen Blechinger, référent en charge des migrations et des réfugiés auprès de l’Eglise régionale et de l’association diaconale du Bade, a déclaré que dans les Eglises régionales protestantes et les diocèses catholiques, le baptême est toujours précédé d’une préparation intensive. Il a fait remarquer que les tribunaux et l’Office fédéral des migrations et des réfugiés contrôlaient le processus de baptême de manière très précise, et pour partie «complètement excessive». «Un simple certificat de baptême n’est pas suffisant», a-t-il affirmé à l’agence de presse protestante allemande EPD. Jürgen Blechinger a poursuivi en expliquant que d’un autre côté, de nombreuses audiences ressemblaient plus à un examen de théologie qu’à une vérification de la sincérité du demandeur d’asile dans son désir de se convertir au christianisme.

On ne devient pas chrétien en un claquement de doigts

L’évêché d’Augsburg, où avait été baptisé le réfugié afghan, a aussi souligné: «Avant que quelqu’un soit baptisé et donc accueilli au sein de l’Eglise, il lui faut passer par un processus de préparation et de contrôle de plusieurs mois.» Cette règle s’applique à tous les candidats au baptême, quelles que soient leurs origines ou leur ancrage culturel. «On ne devient pas chrétien en un claquement de doigts», a déclaré Bertram Meier, directeur du bureau pastoral de l’évêché.

Avant que le baptême puisse être célébré, il faut demander l’autorisation expresse de l’ordinariat épiscopal, a ajouté Bertram Meier. «Nous nous assurons ainsi que nul ne se fasse baptiser par un “abus de confiance”. De ce fait, nous n’avons jamais eu connaissance d’un seul cas où le baptême ait servi de prétexte pour éviter une expulsion.» Le nombre de musulmans à se faire baptiser est ces dernières années devenu très faible — moins de dix personnes par an à l’échelle de l’évêché.

En juillet 2014, le tribunal administratif de Munich avait établi que le réfugié afghan avait «fait une conversion sincère, et pratiquait également la foi chrétienne de manière ouverte et manifeste». Il s’était fait baptiser et confirmer en 2012 et allait, d’après ses dires, régulièrement à l’Eglise. «Dans une telle situation, on peut partir du principe que le demandeur, à son retour en Afghanistan, se verrait soumis à la menace concrète d’attaques graves sur sa personne du fait de son renoncement à la foi musulmane au profit du christianisme.»


Les baptêmes de demandeurs d’asile

Nombre de réfugiés souhaitent se faire baptiser en Allemagne. Sur ce sujet, les Eglises ont établi des limites et des règles. Elles tiennent tout particulièrement à la présence d’une préparation intensive avant le baptême. L’agression mortelle commise par un converti afghan a lancé un débat sur le baptême des demandeurs d’asile.

«Les personnes désireuses de se faire baptiser ont besoin de beaucoup de temps. Il doit s’agir d’un délai suffisant pour apprendre à bien connaître la foi et la communauté, et pour se présenter à cette dernière», peut-on lire dans le guide d’instructions «Du traitement des aspirations au baptême des demandeurs d’asile», publié en 2013 par l’Eglise protestante d’Allemagne (EKD) et l’Union des Eglises protestantes libres (VEF). On y souligne notamment qu’une initiation poussée est de mise avant le baptême.

Une relation doit être bâtie entre le futur baptisé et Dieu, dit-on également. Cette phase comprend des entretiens réguliers sur les contenus de la foi, une participation à des cultes et des exercices permettant de familiariser la personne avec la pratique de la foi. La manière dont tout cela s’applique concrètement et l’objet exact de cette initiation sont de la responsabilité du pasteur en exercice et de la communauté. La conférence des évêques catholiques allemands souligne, elle aussi qu’un «processus de préparation et de contrôle de plusieurs mois» est de mise avant qu’une personne soit baptisée et accueillie au sein de l’Eglise. Cette règle s’applique à tous les candidats au baptême, quelles que soit leurs origines ou leur ancrage culturel. Le catéchuménat, c’est-à-dire la préparation au baptême, dure en général un an environ. La conférence des évêques a publié sur ce thème le guide pratique «Transmettre par l’amour la parole du Christ».

Le baptême n’est pas sans incidence dans une procédure d’asile. L’Office fédéral des migrations et des réfugiés comme les tribunaux peuvent vérifier la sincérité d’une conversion. L’EKD et les Eglises libres s’y opposent lorsque ce processus consiste à contrôler des connaissances factuelles. «La foi est alors réduite à l’acquisition d’un savoir et la dimension relationnelle, la confiance croissante dans les promesses de Dieu est négligée. Du point de vue de l’Eglise, ce type de contrôle de la foi est à éviter», peut-on lire dans le guide d’instructions de l’EKD et des Eglises libres.