Eglise réformée Berne-Jura :Le mariage aux pâturages désormais possible

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Eglise réformée Berne-Jura :Le mariage aux pâturages désormais possible

28 août 2003
Dans une clairière verdoyante ou sur les rives d’une rivière, il sera possible de recevoir la bénédiction nuptiale en dehors des églises
L’idée suscite des réactions chez les pasteurs.

«Cela me plairait beaucoup: on varierait les plaisirs», s’enflamme le pasteur Marc Seiler de Porrentruy. L’idée de quitter les murs austères du temple pour célébrer les mariages ne l’inquiète pas du tout. Si le synode confirme sa décision en décembre – ce qui ne devrait poser aucun problème, une modification du règlement de l’Eglise réformée Berne-Jura permettra de célébrer les bénédictions de mariages ailleurs que dans les églises.

Pour le Conseil synodal, l’ancienne réglementation devenait difficilement applicable. Dans toutes les régions, on trouve des pasteurs qui acceptent déjà de «sortir des murs». Pour répondre à la demande de certains couples qui appréhendent les sanctuaires: «Nous n’allons jamais au culte, explique cette jeune fiancée, alors nous nous sentons un peu mal à l’aise de demander l’église juste pour notre mariage.» Une réserve qui n’a pas de raisons objectives puisque chacun reste le bienvenu dans l’église de sa localité.

N’empêche, pour certains couples, les édifices religieux souffrent d’une image de sérieux et de morale. Si les sonneries de cloches et les grandes orgues conviennent toujours à la grande majorité, le souci de «faire original», de préparer une célébration au plus près de ses goûts conduit à solliciter la présence d’un ministre dans un autre décor.

§ExtravagancesLes demandes les plus saugrenues arrivent dans les cures. Après les envies de clairières ou de cascades, c’est une chapelle du centre d’attraction Europa Park que d’aucuns choisissent. En bateau, à cheval ou en ballon, toutes les fantaisies sont permises, pourvu que l’on «ne fasse pas comme tout le monde». Soucieux de préserver le sens de la célébration, les pasteurs goûtent assez peu ces extravagances: «Les mariés se font beaucoup d’idées qui ne peuvent pas trouver leur place dans un culte», soupire l’un d’eux.

Pour éviter les dérives, le nouveau règlement prévient: le lieu choisi doit respecter la dignité d’un service religieux. Une exigence assez vague qui laisse place à toutes les interprétations. Plusieurs ministres s’en inquiètent d’autant qu’il leur revient la tâche ardue de négocier avec des époux très imaginatifs. Pour Maurice Devaux, pasteur à La Neuveville, la difficulté n’est pas insurmontable: «Il faut vraiment ouvrir le dialogue pour comprendre quelles sont leurs motivations exactes. C’est une question de pastorale: ils peuvent avoir de très bonnes raisons de renoncer à l’église.» Les sollicitations doivent donc être considérées au cas par cas.

§Un lieu de rassemblementLes quelques expériences déjà tentées montrent pourtant qu’un mariage béni à l’extérieur ne se déroule pas forcément moins bien qu’à l’église. «Pour avoir vécu certaines ambiances très déconcentrées à l’église, il faut admettre que le bâtiment ne garantit rien», constate Raymond Bassin, conseiller synodal et pasteur à Vauffelin. Par contre, dans un cadre plus original et qui correspond mieux aux mariés, l’attention peut s’améliorer et le message passe. D’autant que les préparatifs sont plus importants quand on décide de se priver d’église. Une table, un lutrin, une bougie, des sièges pour l’assemblée, une décoration soignée, le culte en plein air demande des efforts. Quand un couple choisit de s’investir à ce point, la bénédiction se vit aussi plus intensément. Pour Marc Seiler, «l’essentiel, c’est que la préparation soit bien faite et que la liturgie reste correcte.»

En fait, les pasteurs poseront leurs conditions: il faut pouvoir accueillir une assemblée, le cadre doit favoriser le recueillement, les paroles prononcées doivent être audibles… «A mon sens, cela exclut, par exemple, les mariages en bateau, prévient Maurice Devaux. On ne peut pas admirer le paysage qui défile et vivre en même temps une célébration.» Cela vaudra aussi pour les mariages sous l’eau ou en avion. Et quelques autres situations délicates.

Un bref sondage dans le Jura et le Jura bernois révèle que ces demandes «bucoliques» restent très minoritaires. Pour ceux qui attendent encore une bénédiction, l’église garde largement la cote. «Et on assiste même à un retour assez évident des flonflons», regrette la pasteure de Péry, Dominique Giauque-Gagnebin. Par contre, le nombre des fiancés qui se contentent d’un mariage scellé à l’Etat civil augmente inexorablement. Alors Dominique Giauque-Gagnebin reste perplexe: «Jusqu’où l’Eglise est-elle prête à aller juste pour plaire aux gens? Pourquoi avons-nous tant de peine à dire non» Et de se demander si l’envie d’avoir du succès ne finira pas par remplacer l’exigence de fidélité à l’Evangile.