Les écrivains face à DieuUn itinéraire littéraire entre doute et conviction

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Les écrivains face à DieuUn itinéraire littéraire entre doute et conviction

2 juillet 2003
Le Dieu des poètes n’est pas au ciel mais plutôt dans les bas-fonds, les déserts, dans un regard ou un visage aimé
Il est songe et atmosphère plutôt que concept. Le lecteur retrouve ses propres questionnements à travers l’itinéraire littéraire, proposé dans l’ouvrage collectif « Les écrivains face à Dieu », à travers les convictions et les doutes de sept auteurs, croyants et agnostiques, taraudés par la question de Dieu. Pour Victor Hugo, croyant et inlassable chercheur de Dieu, c’est au poète de capter et de transmettre les signes divins, « rendus mal lisibles par la folie des hommes ». L’auteur des « Misérables » rejette farouchement tout dogme, rompt avec l’Eglise et prend le parti du peuple et des plus démunis, qui sont, à ses yeux, les messagers privilégiés de Dieu. Pour l’écrivain, ce n’est plus l’Eglise qui est porteuse du message évangélique, mais tout homme qui se bat pour la liberté, la justice et une société meilleure. Anticlérical virulent, Hugo est partisan d’une religion sans religion, celle-là même que stigmatise Claudel comme un vin sans alcool.

La mort de Léopoldine, sa fille préférée, n’entame en rien sa foi : Chacun a sa façon de regarder la nuit, écrit-il, j’ai foi, écrit-il, la foi, c’est la lumière haute, ma conscience à moi, c’est Dieu que j’ai pour hôte ».

Cette certitude hugolienne, Antoine de Saint-Exupéry l’ignore mais l’appelle de ses vœux. « Apparais-moi Seigneur, car tout est dur lorsqu’on perd le goût de Dieu ». La perte de sa foi d’enfant ressemble à un terrible sevrage qui entraîne chez l’écrivain un sentiment de solitude et d’exil et une grande nostalgie. Sa soif de Dieu est restée inapaisée. A ce Dieu toujours absent et peut-être simplement rêvé, - n’est-il peut-être que le mythe qui fait grandir et l’étendard d’une éthique du devoir ? – l’écrivain adresse d’ardentes prières, tout en confirmant son agnosticisme. Chez lui, la ferveur s’est substituée à la foi.

§La foi, une espérance tragiqueAlbert Camus, pour sa part, est tiraillé entre refus de Dieu et rejet de l’athéisme. « J’ai le sens du sacré, et je ne crois pas à la vie future, voilà tout ». Pour lui, « l’homme révolté » est celui qui cherche, loin du sacré à et de ses valeurs absolues, à trouver la règle d’une conduite, quand on ne croit ni en Dieu ni en la raison. Tout au long de son œuvre, il n’a de cesse de s’interroger sur le destin de cet homme sans Dieu, qui « est une affaire d’homme, qui doit être réglée entre les hommes ». Pour lui, la foi chrétienne est «moins une paix qu’une espérance tragique ». L’appel à la lucidité, la conscience de l’absurde et la révolte qui fonde la liberté de l’homme, traversent toute l’œuvre de Camus.

Les auteurs de l’ouvrage abordent également les rapports à Dieu, fort contrastés, de quatre autres écrivains : Dostoïevski, Charles Péguy, Simone Weil et Christian Bobin. En fait, les écrivains se font l'écho des doutes et des convictions du commun des mortels, et mettent en mots l'indicible. Une manière de guider le lecteurdans son cheminement spirituel personnel.

§Les écrivains face à Dieu, Hugo, Dostoïevski, Péguy,Saint-Exupéry, Simone Weil, Camus, Christian Bobin. Sous la direction d’Alain Houziaux, 191 p. 2003, éditions In Press.