Marc Pernot: «Genève est la Mecque protestante»
Né à Paris dans une famille de scientifiques – ses trois frères et soeurs ont également suivi des études de sciences –, Marc Pernot a tout naturellement étudié dans une école d’ingénieurs. C’étaient les débuts de l’informatisation. Lui qui a toujours «adoré» les cartes topographiques travaillera une dizaine d’années en tant qu’informaticien en cartographie: «Mon métier me passionnait. J’avais un très bon poste dans l’administration, avec un statut et un salaire confortables.» Pourtant, un jour, n’y tenant plus, il démissionne, acceptant de diviser son salaire par cinq et de renoncer à sa retraite dorée.
Un engagement absolu
«J’avais besoin de souffler. Cela faisait dix ans que je travaillais à 100% tout en étant en parallèle engagé bénévolement presque à mi-temps dans mon Eglise», explique le Parisien. Chef scout, il était également actif dans le catéchisme des enfants, s’occupait de soutien scolaire, était prédicateur laïque et trésorier d’une association d’entraide. Responsable des groupes de jeunes, il passait toutes ses vacances en camps: «Je faisais même le ménage et le bricolage dans les locaux de mon Eglise.»
Sa décision est difficile à accepter pour ses parents. Pourtant, ils sont issus de familles protestantes engagées depuis des générations dans leur Eglise. «Cela leur donnait du souci. Devenir pasteur n’était pas une tradition familiale. Et j’avais déjà un frère – pasteur à la paroisse de l’Etoile, à Paris – qui avait suivi cette voie…», précise Marc Pernot. Il boucle ses études de théologie «à pas renforcés», poussé par l’absence de salaire. Après ces trois années passées entre Paris et Montpellier, il commence sa deuxième carrière professionnelle, à Nîmes. Il fait alors figure de précurseur en promouvant l’Eglise sur l’internet naissant !
Face à la déchristianisation
Il répond ensuite à une demande «désespérée» venue de Nancy, qui ne trouvait aucun pasteur d’accord de braver… le climat réputé trop humide et frais. «Il n’y fait pas si mauvais que ça! En revanche, j’ai été choqué de voir le manque de culture religieuse. La déchristianisation est incroyable là-bas. C’est pourquoi j’ai développé un concept pour rejoindre la tranche d’âge des actifs», se souvient le Genevois d’adoption.
Sa pastorale sur internet connaît un succès certain. Sa vie privée aussi puisqu’il y rencontre sa future femme, une pasteure coréenne venue dans la région pour y étudier les philosophes Jacques Ellul et Paul Ricoeur.
En 2007, Marc Pernot retourne dans la paroisse de son enfance, l’Oratoire du Louvre. Dans ce lieu «magnifique et bien vivant», il choisit de «remettre la théologie au centre» et reprend tout naturellement son travail de développement de l’Eglise en ligne. Avec un formidable succès puisque son blog compte 110 000 visiteurs mensuels, dont des centaines ont par la suite demandé à recevoir un baptême d’adulte dans l’Eglise», précise-t-il. «C’est la preuve que cela correspond à la façon de pratiquer d’aujourd’hui, chacun à son allure. C’est plus facile compte tenu du rythme de vie moderne. Les gens sont surchargés et ne peuvent pas sans arrêt aller au temple. Ils consultent le blog quand ils le peuvent», explique-t-il. Les deux pics de fréquentation sont la pause de midi et après 22 heures!
Après onze ans dans la «cathédrale protestante de Paris», ce n’est pas un hasard si le sexagénaire choisit de rejoindre Genève. C’est un retour aux sources puisque son grand-père maternel est né dans le quartier de Plainpalais. Il étudiera à l’École de chimie de Nancy avant de s’engager sous les couleurs françaises durant la Première Guerre mondiale. Du côté paternel, Marc Pernot a également des origines helvétiques, vers «l’inattendu» Goumoens-le-Jux, dans le canton de Vaud.
«Pour les réformés français, Genève est la Mecque protestante. Nous avons un attachement historique pour cette ville qui fut la Cité de Calvin, la source des Églises protestantes en France et le refuge des réformés français. Je trouve que l’Église protestante de Genève se bouge pour faire face à la déchristianisation. Elle cherche à inventer de nouvelles choses pour rejoindre les gens. J’aimerais contribuer à cette dynamique. Je crois que l’Évangile n’a jamais été plus actuel et qu’il y a un vrai modernisme du protestantisme réformé en articulant la réflexion et la prière. Il n’y a pas de raison pour que cela ne marche pas!», conclut avec son optimisme coutumier le pasteur-blogueur.
Bio express
1990 Quitte son travail dans l’administration française pour commencer des études de théologie.
1996 En poste à Nîmes, il commence à développer une pastorale en ligne.
2007 Devient pasteur dans la paroisse de son enfance, l’Oratoire du Louvre, à Paris, où il crée un blog qui connaît un beau succès.
1er mai 2018 Rejoint l’Église protestante de Genève où il travaille pour la Région Centre-Ville Rive Gauche et au développement de la présence de l’Évangile sur internet.
Lancé en novembre 2018, le blog de l’Église protestante de Genève développe chaque semaine son offre de prières, de prédications, de contenus théologiques et de questions-réponses. La contribution de plusieurs pasteurs permet de proposer des prédications de différents styles, mais également de valoriser leur travail dans les lieux. «C’est très prometteur. Les pasteurs peuvent alimenter ce pot commun et présenter ainsi notre vision d’Église. Cette diversité fait notre force. Je suis très content de mener ce service d’Église que nous proposons aux gens qui ne sont pas dans l’Église. Tout le monde a besoin d’une nourriture spirituelle régulière », précise Marc Pernot.