«Maîtresse, y’a Léo qui…»

«Maîtresse, y’a Léo qui…» / © Mathieu Paillard
i
«Maîtresse, y’a Léo qui…»
© Mathieu Paillard

«Maîtresse, y’a Léo qui…»

Rodolphe Nozière
29 mai 2024
Conte
Le printemps est bien installé, et les congés d’été, bien que dans un mois, ne vont pas tarder à pointer le bout de leur nez.

Pour Mme Pétronille, maîtresse d’école, c’est la période la plus chargée de l’année. Il lui reste tant de choses à faire que le temps lui paraîtra une fois de plus trop court.

Mme Pétronille doit revoir les derniers détails pour la course d’école avec ses élèves, elle espère qu’il fera beau ce jour-là. Elle doit peaufiner les derniers tests, rencontrer les parents de ses élèves en fin d’année. Elle s’imagine passer un été loin de chez elle, visiter des endroits merveilleux, mais comme souvent elle arrivera au mois de juillet fatiguée et elle en aura oublié de préparer ses vacances, alors elle restera chez elle.

Ce matin, au marché, elle rencontre une amie et elles parlent des vacances d’été. «Il me faut du repos et également découvrir d’autres endroits, j’ai besoin de me dépayser» dit alors la maîtresse d’école.

Son amie lui propose alors une retraite dans un monastère à la campagne qu’elle a découvert l’année dernière: «Tu verras, les paysages sont magnifiques et du repos, tu en auras!»

Et c’est ainsi que, dès le premier jour de juillet, Mme Pétronille fait ses valises pour l’abbaye de Sainte-Frénégonde. Après trois heures de train, elle arrive à destination: les paysages sont magnifiques, des champs, de grandes forêts aux pieds de quelques montagnes, dont certaines ont encore un peu de neige sur les sommets, tout près de la gare, des bus menant à l’abbaye.

Arrivées à l’entrée de celle-ci, une cloche pour signaler sa présence… Mme Pétronille sonne et une religieuse vient lui ouvrir: «Bonjour, je suis Mme Pétronille, je viens pour la retraite et….». Aussitôt, la religieuse lui indique, un doigt sur la bouche, que le silence est la règle. Elle lui fait signe de la suivre puis lui remet, toujours aussi silencieuse, un petit guide pour lui expliquer les conditions de son séjour.

Arrivée dans une chambre minuscule, la maîtresse d’école se met à lire le guide et quelle n’est pas sa surprise de découvrir que le silence est obligatoire tout au long de la journée, qu’il n’y a pas de connexion internet, et que les natels doivent être éteints (en tout petits caractères il est ajouté que de toute façon il n’y a que très peu de réseau)!

«Effectivement, cela va me changer de mes élèves un peu trop bruyants, et de mon natel qui sonne ou vibre très souvent dans la journée. Ça va me faire du bien, tout ce calme…».

Le repas du soir se passe dans le silence absolu. Mis à part les religieuses, il n’y a que quelques touristes, ils ont l’air sympathiques, mais impossible d’entamer la conversation. De retour dans sa chambre, la maîtresse d’école se met à lire avant de s’endormir.

Cette retraite dans le silence et loin de l’agitation des boîtes e-mail, d’internet ou des réseaux sociaux va permettre à Mme Pétronille de se détendre. Le problème, c’est qu’au bout de deux jours, elle s’ennuie, et cette maîtresse est trop bavarde pour rester silencieuse si longtemps.

Elle découvre alors un atelier jardinage et y retrouve d’autres touristes. Enfin une activité qui va l’occuper et la distraire un peu. Bien entendu, elle laisse échapper quelques mots, aussitôt rattrapés par des «chuts….» et des froncements de sourcils. Mme Pétronille comprend alors d’autant plus ses élèves à qui elle demande souvent le silence…