Sortir de la logique du «eux» et du «nous»
«La question de l’identité est légitime, l’obsession identitaire est mortifère.» Dans son dernier ouvrage, Le Vertige identitaire (Actes Sud, 2022), Alain Chouraqui cherche à comprendre les mécanismes de l’extrémisme identitaire. A travers l’Histoire, ils «ont été le principal moteur vers la dictature puis le crime de masse», explique ce responsable scientifique de la chaire UNESCO «Education à la citoyenneté, sciences de l’homme et convergence des mémoires».
Sa réflexion est le fruit d’une existence consacrée à la recherche et à l’analyse de génocides passés. Alain Chouraqui explique que c’est dans le terreau de crises et de déstabilisations sociales que naît l’extrémisme identitaire. On le reconnaît quand émergent des discours d’exclusion de l’autre sur des bases nationalistes, religieuses, ethniques. «Quand le ‹eux› et le ‹nous› dominent le débat public, il deviennent vite un ‹eux contre nous›, pour mieux justifier ensuite un ‹nous contre eux›, voire un ‹nous sans eux›.» Une base sur laquelle peut prospérer un engrenage antidémocratique à même de faire basculer une société entière dans le pire. Surtout si elle est fragilisée, par exemple par des structures médiatiques bouleversées et par une vérité commune de moins en moins partagée. La polarisation des débats entraîne leur radicalisation, puis l’exclusion. Heureusement, souligne l’auteur, il existe mille et une manières de ne pas sombrer dans la haine. Et un seul acte de résistance peut aussi entraîner tout un engrenage positif.