ONU : l’exploitation des enfants en question

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ONU : l’exploitation des enfants en question

6 mai 2002
Du 8 au 10 mai, la session extraordinaire des Nations Unies sera consacrée aux droits de l’enfant
Un champ législatif relativement récent, où beaucoup reste à faire malgré la signature d’une convention il y a plus de 10 ans. Les guerres, l’exploitation sexuelle ou encore la maltraitance ravagent encore beaucoup de petites vies. Le point à Sion avec Paola Riva, collaboratrice de l’Institut international des droits de l’enfant. La Convention relative aux droits de l’enfant est le traité international signé par un très grand nombre de pays. Depuis son approbation fin 1989 par les Nations Unies, 191 pays ont en effet ratifié cette série d’engagements. Seuls manquent à l’appel la Somalie et les Etats-Unis. La première parce qu’elle n’a pas de gouvernement, et les seconds justement parce qu’ils en ont un, selon une boutade connue.

Et pourtant, beaucoup reste à faire. Dans le monde, nombreux sont les enfants qui travaillent, qui se prostituent, qui ne peuvent pas aller à l’école ou qui ne sont tout simplement pas écoutés. Du 8 au 10 mai prochains à New York, la session extraordinaire de l’assemblée générale de l’ONU sera l’occasion de faire le point. «Les choses avancent, il y a une réelle prise de conscience. Mais comme tout ce qui concerne les droits de l’homme, si la Convention engage le signataire, chaque Etat demeure souverain dans l’application des textes », explique à Sion, Paola Riva, collaboratrice de l’Institut international des droits de l’enfant (IDE).

§Mine d’informationsFondée en 1995 par Jean Zermatten, juge des mineurs valaisan, cette institution mène le combat sur un double front. Celui de l’information, d’abord. Chaque année au mois d’octobre, l’IDE organise un séminaire de plusieurs jours qui réunit des dizaines de participants venus du monde entier. Après la thématique de l’enfant dans la guerre, ce sont les discriminations dont sont victimes les filles qui retiendront l’attention cette année. Le site Internet de l’institut (www.childsrights.com) constitue véritable mine d’information, avec un impressionnant recueil de textes législatifs et encore un centre virtuel de documentation regroupant les jos_content, publications, thèses et publications diverses sur le sujet.

La formation constitue l’autre cheval de bataille de l’Institut, en Suisse et ailleurs dans le monde. « Le droit des enfants est un domaine très récent. Nous formons des personnes concernées comme des magistrats, des avocats, des assistants sociaux, des directeurs d’ONG aux subtilités des textes internationaux, ainsi que dans des domaines spécifiques comme la justice juvénile, la maltraitance, les discriminations », précise Paola Riva qui a elle-même poursuivi ses études de droit par un post-grade en droit de l’enfant aux Etats-Unis. Par ailleurs, un projet de Master international et interdisciplinaire devrait aboutir en 2003.

Dix ans après la signature de la Convention, c’est l’heure des premiers bilans. L’un a été rédigé par des ONG, l’autre par le secrétaire général de l’ONU Kofi Annan. Des résultats notables sont mentionnés, notamment dans le domaine de la santé avec la quasi éradication de la poliomyélite, ou dans celui de l’éducation avec le développement de nombreux projets. Pourtant, chacun reconnaît les échecs de la lutte contre le sida. Et la planète compte encore cent millions de mineurs, dont 60% de filles.

§Pédophilie en questionLes nouvelles de la conférence spécialisée dans l’exploitation sexuelle des plus jeunes qui s’est déroulée au Japon fin 2001 sont alarmantes. Pédophilie sur le web, prostitution enfantine en Amérique du sud et en Afrique : le mal s’étend, favorisé par les nouvelles technologies. « Il ne faut pas se cacher qu’il s’agit d’un commerce très lucratif, ce qui complique la lutte, reconnaît Paola Riva. Cela nécessite une vaste prise de conscience, qui passe par les organismes de tourisme ou de transport, et par les médias. »

Voilà l’un des intérêts de la session extraordinaire, vaste forum qui réunira quelque 3'600 organisations non gouvernementales, une pléiade de délégations officielles et plus de 70 chefs d’Etat et qui débouchera sur la signature du plan d’action pour les dix prochaines années : élargir le consensus en matière de droit de l’enfance et faire en sorte de dépasser les déclarations d’intention. Y compris en Europe, où un pays comme l’Angleterre se situe clairement dans la classe des mauvais élèves, en compagnie entre autres de l’Afghanistan, de Sierra Léone, du Congo et du Brésil. Paola Riva ne perd pas espoir : « Nous avons tous été enfants. Lorsque l’un d’entre eux souffre, chacun doit se sentir concerné. Ainsi, ce sujet peut être abordé même dans des pays comme la Birmanie où il demeure impossible de parler des droits de l’homme. »