Lausanne : des éducateurs à la rescousse de la police

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Lausanne : des éducateurs à la rescousse de la police

10 octobre 2002
Une « unité socio-éducative de terrain » s’apprête à seconder les forces de l’ordre municipale dans sa lutte contre les incivilités des marginaux et gens de la rue
Baptisée « UniSET », la structure comprendra six intervenants sociaux chargés de contenir les débordements à Saint-Laurent et ailleurs.

Le rassemblement des escaliers de Saint-Laurent constitue depuis bientôt dix ans un vrai casse-tête pour les municipalités lausannoises successives. Alternant les périodes de laisser-faire à celles du tout répressif, les autorités de la capitale vaudoise semblent ne jamais avoir réellement trouvé de solution satisfaisante. Aujourd’hui, à l’heure où d’autres lieux de la ville sont envahis par les dealers, le Département de la sécurité sociale et de l’environnement (DSSE) s’apprête à inaugurer une nouvelle voie d’intervention. Dès la mi-novembre, une « unité socio-éducative de terrain » (uniSET) remplacera en partie la police dans le maintien de l’ordre.

Déjà engagés, six intervenants sociaux se relaieront à « St-Lô » et ailleurs pour

canaliser les débordements, incivilités et autres troubles provoqués par les attroupements des gens de la rue. Selon les termes officiels, il s’agira d’« apaiser les tensions entre les habitants et les groupes de personnes dont le comportement pose problème », en jouant un triple rôle de prévention, de mise en garde et de médiation.

§Exemple zurichoisLa petite équipe disposera d’un local de permanence, situé dans un premier temps au bas de l’avenue de Beaulieu. Les uniques armes à disposition seront le dialogue et la persuasion, et seuls des téléphones cellulaires viendront compléter un vêtement clairement identifiable, sans doute un blouson avec un insigne spécifique.

En fait, l’exécutif lausannois s’inspire très directement d’une initiative zurichoise. Depuis mars 2000, confrontées aux problèmes posés par un certain nombre de marginaux turbulents, les autorités de cette ville ont créé un groupe d’intervention mobile chargé de rappeler les règles de la vie commune aux usagers des places et parcs publics. « Efficace, l’action de la police se voit limitée par les bases légales. Les infractions continueront naturellement à être de son ressort. Mais certains agissements inquiètent ou dérangent sans qu’il y ait pour autant entorse à la loi. La mise en place d’uniSET nous a paru une réponse appropriée à ce type de situation », explique Philippe Meystre, chef du secrétariat général du DSSE auquel sera rattachée l’unité.

Certes, la situation des deux centres urbains ne saurait être directement comparée. Le Département estime cependant que sur un plan « qualitatif » les analogies paraissent suffisamment nombreuses pour que l’exemple zurichois débouche sur des résultats identiques à Lausanne. Le fait que le législatif des bords de la Limmat aie choisi de poursuivre l’expérience semble donc de bonne augure pour le DSSE.

§Pour la population avant toutLes responsables du projet réfutent l’idée selon laquelle cette initiative montre l’échec de l’intensification de l’action policière, dont l’un des buts était précisément de rassurer la population. « La présence des agents, notamment devant les escaliers de Saint-Laurent depuis 1999, demeure un moyen efficace dans ce domaine, note la directrice du Département Silvia Zamora. Il suffit d’ailleurs de la diminuer pour que le nombre de plaintes augmente ». Pour la municipale, il manquait jusqu’à présent un suivi, une prise en charge dans la durée. UniSET doit-elle donc être comprise comme une alternative plutôt que comme un changement de cap ? « Tout à fait, poursuit Silvia Zamora. Cela permettra de libérer les forces de police pour leurs tâches propres, en confiant ce genre d’intervention à des travailleurs sociaux qui peuvent en outre offrir un soutien aux personnes en difficulté ».

Les autorités lausannoises donnent au minimum une année à cette expérience pour faire ses preuves. Reste une question. Le préavis de la Municipalité estime que les démarches entreprises depuis des années par la Pastorale des rues, la paroisse ou encore le groupe des escaliers de Saint-Laurent « n’ont pas permis d’apporter d’amélioration sensible ». Philippe Meystre, de son côté, reconnaît que « les usagers des escaliers sont en général parfaitement au courant des différentes structures d’aide et d’accueil auxquelles ils peuvent s’adresser ». On peut donc se demander si la principale motivation dans la mise en place d’UniSET n’est pas de rassurer la population tout en évitant de cultiver une image trop répressive.