« Viens chez moi »:Faciliter l’intégration des enfants immigrés

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« Viens chez moi »:Faciliter l’intégration des enfants immigrés

13 décembre 2002
Depuis 3 mois, Yad, 8 ans, requérant d’asile, se rend tous les samedis chez Alizée, 9 ans
Cette rencontre se fait dans le cadre de « Viens chez moi », un projet dont le but est de favoriser, hors école, les contacts entre enfants immigrés et familles suisses.« Passe-moi la ciseau, s’il te plaît ». Alizée le reprend gentiment : « on dit les ciseaux ». « C’est pour qu’il apprenne plus vite et mieux que je le corrige », précise-t-elle. Tous deux sont en train de réparer un mini-ordinateur qui permet de se familiariser avec la langue française. Yad en est très fier : il l’a reçu en cadeau tout récemment et a voulu le montrer à Alizée. Aussitôt remis en état, l’ordi redevient le centre de leur attention et c’est à qui, du petit Kurde ou de la petite Suissesse, arrivera le plus vite à reconstituer les mots qui apparaissent sur l’écran.

Yad est arrivé d’Irak il y a un an, avec ses parents. Il a été intégré dans une classe de Pully, avec des enfants qui ont en moyenne deux ans de moins que lui. Il n’a pas été noté les deux premières années, le temps qu’il rattrape le niveau scolaire de son âge. Sa principale difficulté, c’est le français, qu’il trouve « très, très difficile ». Ne maîtrisant eux-mêmes pas la langue, ses parents se sont donc adressés à l’association « Viens chez moi » (voir encadré) pour faciliter son intégration.

Alizée, de son côté, est fille unique. Scolarisée dans une école privée, elle n’a pas la chance d’avoir des camarades vivant dans son quartier. Ouverte sur le monde, croyant au partage et à l’échange, Valérie, sa maman, s’est adressée à « Viens chez moi » pour montrer à sa fille qu’il existe d’autres cultures et d’autres manières de vivre. Il y a 4 ans, elle avait tenté une expérience un peu similaire en accueillant pendant un mois une petite fille roumaine. Des vacances qui leur avait laissé à toutes trois un excellent souvenir.

Alizée est d’autant plus ravie de la présence de Yad qu’elle s’ennuyait « un peu, le samedi ». « C’était dommage, parce que j’ai plein de jeux à jouer à deux et que j’étais souvent seule. Comme j’ai toujours imaginé que j’aurai un jour un frère ou une sœur, je n’ai aucune peine à les partager ». Comme pour prouver le bien-fondé de ce qu’elle vient de dire, elle se lance alors avec Yad dans une chamaillerie digne des meilleures fratries.

Entre eux, le courant a tout de suite passé. Barbie, ordinateur, peluches, biscuits de Noël , promenade: ils s’investissent à fond et ensemble dans toutes les activités. Au point qu’il est difficile de les séparer le soir venu. Alizée n’a remarqué aucune différence culturelle entre Yad et elle. Mais il est vrai que Yad ne parle jamais de son pays et de ce qu’il y a vécu. A force d’être questionné, il lâche juste que « chez moi, les maisons sont plus grandes. » Puis, avec des yeux pétillants de malice, il ajoute : « mais la Suisse, c’est mieux, parce qu’il y a des piscines et les filles sont plus jolies. » Respirant la joie de vivre et la vivacité d’esprit, Yad a un désir évident de s’intégrer. Il s’est fait des copains à l’école, joue dans une équipe de foot et aimerait « être comme les gens d’ici et faire sa vie ici ».

Au vu des liens qui se sont noués entre les deux enfants, Valérie ne redoute-t-elle pas un déchirement, de part et d’autre, si la demande d’asile des parents de Yad était refusée? « C’est certain. Mais ce jour-là, je ferai tout mon possible pour soutenir sa famille et faire en sorte qu’elle puisse rester. Je penserai à sa peine beaucoup plus qu’à la nôtre.»