Créer des repères

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Créer des repères

13 décembre 2002
Il y a une dizaine d’année, la Croix-Rouge zurichoise lançait le concept « Viens chez moi »
Une idée séduisante, reprise depuis 1998 à Lausanne, mais pas toujours facile à concrétiser.« Viens chez moi » a pour but de créer des contacts entre des communautés qui ne se rencontrent jamais », explique Stéphanie Zutter, coordinatrice du programme*. « Les enfants se voient à l’école, mais rarement en dehors de ce cadre. C’est d’autant plus dommage que les Suisses ont la chance de vivre au milieu d’une grande richesse de communautés et de cultures différentes. »

Son travail consiste à mettre en relation des enfants étrangers, essentiellement des requérants d’asile ou des sans-papiers, et des familles suisses. Le plus souvent, les rencontres ont lieu le mercredi : l’enfant est invité à partager repas et jeux. Parfois, on l’aide aussi pour ses devoirs. « Cela lui offre la possibilité de se faire des repères. C’est d’autant plus important que, dans ce monde nouveau, ses parents n’en ont souvent pas. De plus, bien souvent, ces enfants sont les parents de leurs propres parents. Apprenant plus vite la langue, ils les aident dans leurs démarches, jouent les traducteurs, les intermédiaires. Lorsqu’ils sont accueillis dans les familles, en revanche, ils peuvent redevenir des enfants. »

Une dizaine d’échanges sont actuellement en cours. Certains depuis quelques années, d’autres depuis quelques mois. Mais les listes de Stéphanie Zutter comptent également dix familles et dix enfants en attente. « Jouer les intermédiaires, faire en sorte de trouver la bonne famille pour le bon enfant, n’est pas facile. Cela nécessite des dizaines de téléphones et de rencontres », souligne-t-elle.

Parmi les difficultés auxquelles elle doit faire face, il y a « les familles qui s’inscrivent sans mesurer qu’il s’agit d’un réel engagement, de six mois minimum. Parfois aussi, on croit que le courant a passé, mais on s’aperçoit au bout de deux ou trois fois que cela ne colle pas, pour l’un ou pour l’autre. Il faut alors tout recommencer à zéro. » Enfin, il y a des enfants moins faciles à placer. « Par exemple, ceux qui ont été tellement traumatisés par ce qu’ils ont vécu qu’ils ont un comportement difficile. Ou les adolescents, parce que les ados de la famille ont déjà des copains et une vie à l’extérieur. »

En charge du programme depuis un an, Stéphanie Zutter prend son travail (bénévole) très à cœur. Elle rencontre tous les protagonistes, est présente lors de la première entrevue et assure un suivi. « Les échanges qui foirent me font mal, je suis à chaque fois très déçue. Ceux qui réussissent, en revanche, c’est le bonheur. »

Si elle est aussi sensible au thème de l’intégration, c’est qu’elle a elle-même été réfugiée. « Je sais ce que ça représente. Je l’ai vécu. J’ai été aidée et quand on a été aidé, c’est un devoir de poursuivre la chaîne ».