Sommet mondial de l'ONU sur l'information : Les autorités suisses priées de veiller au grain

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Sommet mondial de l'ONU sur l'information : Les autorités suisses priées de veiller au grain

11 février 2003
Le premier sommet mondial de l’ONU sur la société de l’information (SMSI) qui aura lieu Genève du 10 au 12 décembre 2003, est mal parti : C’est du moins l’avis des signataires de la Plate-forme suisse qui regroupe une vingtaine d’organisations (associations humanitaires, de journalistes, de professionnels des médias et d’internautes) qui ont fait part de leur inquiétude ce matin à Berne lors d’une conférence de presse : si l’on n’y veille pas, il n’y sera absolument pas question d’information, mais uniquement de nouvelles technologies, de problèmes techniques et économiques
« On risque de voir le Sommet mondial de l’ONU sur la Société de l’Information (SMSI), faire l’impasse sur le type de société de l’information que l’on veut promouvoir, sur ses enjeux, ses contenus médiatiques, sur le droit de chacun à être informé, mais aussi sur la liberté de la presse », avertissent les signataires de la Plate-forme suisse créée à Lausanne en novembre dernier. Etrangement, relèvent-ils, les professionnels des médias traditionnels, télé, radio et presse écrite, ont été soigneusement tenus à l’écart par les organisateurs de ce prochain Sommet. Leur rôle et l’éthique de leur métier n’est en effet le sujet d’aucune des huit tables rondes qui lanceront la deuxième réunion préparatoire du Sommet ce printemps. « "Si la société de l’information fournit à la presse des outils inestimables, elle comporte aussi de graves menaces sur son indépendance et sa qualité », rappela Michel Bührer, représentant la Fédération suisse des journalistes (FSJ).

« Il importe pour l’avenir de la démocratie, a précisé ce matin Guillaume Chenevière, représentant le Conseil Mondial de la Radio-Télévision, que la communauté internationale ne définisse pas la future Société de l’information sous le seul angle des nouvelles technologies, mais affirme d’abord qu’elle implique le droit de chacun et de chacune à une information impartiale et pertinente dans sa langue et dans sa culture, et plus généralement, à des contenus médiatiques reflétant la réalité du monde dans lequel chacun vit ». L’ancien directeur de la Télévision suisse romande rappelle que beaucoup de groupes sociaux n’ont pas accès à l’information dont ils ont besoin pour leur vie, du fait des barrières sociales, économiques, physiques et géographiques.

Chantal Peyer, qui représente Pain pour le Prochain, donne des chiffres révélateurs d’un monde à deux vitesses : seuls 6,7% de la population mondiale, - dont 83 % habitent dans les pays du Nord -, utilisent Internet. Les statistiques confirment par ailleurs que les usagers de la Toile sont en majorité des hommes issus de zones urbaines et ayant un bon niveau de formation. « Loin de marquer l’avènement d’un village global égalitaire, précise-t-elle, le développement actuel des technologies de l’information et de la communication renforce les fractures entre les pays riches et les pays en développement, mais aussi les fractures économiques, sociales et culturelles au sein d’une même société ».

« Jusqu’à présent, les autorités suisses ont été incapables d’affirmer un profil fort et de définir une vision de la société de l’information », a déploré Michel Egger, responsable à Lausanne de la Communauté de travail Swissaid/Action de Carême/Pain pour le Prochain/Helvetas/Caritas/Eper. » Pour lui, les raisons sont multiples: absence de leadership et de volonté politique forte, incohérences internes à l’administration fédérale, manque de consultation de la société civile.

Il est encore possible de rectifier le tir, afin de ne pas emboîter le aveuglément le pas de l’Union Internationale des Télécommunications (UIT), disent en chœur les signataires de la Plateforme, si les autorités suisses mettent au plus vite sur pied une instance où seront représentés tous les acteurs susceptibles d’apporter leur contribution au processus du Sommet et représentant équitablement les milieux politiques, économiques, ainsi que la société civile et les professionnels des médias. Michel Bührer, chargé du dossier par la Fédération suisse des journalistes (FSJ), qui a été admis dans la délégation officielle suisse, rappelle qu’il est de toute urgence de défendre l’accès garanti aux sources publiques, la protection des sources, le caractère de bien public de l’information, et de créer une législation pour lutter contre la concentration excessive des médias. Si cerzainses assurances ne sont pas données, les signataires de la plate-forme se réservent le droit d'organiser un contre-sommet, tel qu'il a été envisagé à Porte Alegre.