Eglises romandes en ligne : chacun prêche pour sa paroisse

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Eglises romandes en ligne : chacun prêche pour sa paroisse

13 février 2003
Chargée de veiller aux destinées communes des Eglises sur le Net, La commission romande est en panne
Pasteur et journaliste à la Radio suisse romande, Michel Kocher qui la présidait, a annoncé son départ. Etat des lieux, alors qu’une synergie peine à se mette en place en Suisse romande. Journaliste, responsable du service protestant de la radio suisse romande (RSR), Michel Kocher connaît bien la difficulté qu’éprouve le monde réformé à travailler ensemble. « Un peu découragé mais pas déçu », il vient de démissionner de la commission Internet des Eglises romandes (CIEP). Le lancement, à la fin de l’été, du portail www.protestant.ch n’a visiblement pas joué le rôle fédérateur attendu. « Internet intéresse tout le monde, les Eglises cantonales comme les associations ou les paroisses. Mais on peine encore à dépasser la promotion de sa propre image pour faire rayonner tous ensemble l’image du protestantisme ».

Selon Michel Kocher, dans ce domaine comme dans d’autres, la coordination des forces prendra du temps pour surmonter un individualisme très protestant. « Pour l’instant, la toile ressemble au monde réel. Et la réalité, ce sont des Eglises cantonales, pas un protestantisme romand ». Son collègue dans la commission romande, Gabriel Bader, ne dit pas autre chose : « Si on veut se présenter différemment sur le Net, il faut d’abord que nous changions nos fonctionnements dans la réalité ». Pour ce pasteur neuchâtelois spécialiste de la question, si la commission a encore un rôle à jouer, c’est de servir de plate-forme de ressources, notamment pour aider les Eglises cantonales à installer Intranet pour la communication interne. « Nous attendons toujours une réponse politique de la part de la Conférence des Eglises romandes (CER) pour savoir dans quelle direction aller ».

Gabriel Bader reste également persuadé que le réseau informatique demeure un excellent outil pour la structure assez dispersée de l’Eglise. « Mais il s'agit de répondre aux besoins, non poursuivre un idéal. Je ne crois d’ailleurs pas qu’il faille forcément présenter une image romande forte sur le Web, entre autres parce que Les contextes locaux sont très différents, jusque dans les rapports entretenus par les Eglises avec l’Etat ». Selon lui, l’internaute cherche avant tout des renseignements pratiques. Un portail généraliste, même peu fourni, qui l’amène au site de sa région, suffit. « Si le surfeur tient à approfondir une question éthique ou théologique, il faut alors qu'un lien le renvoie au portail où ce genre de documents a sa place. On ne peut faire l’économie du niveau cantonal, car l’outil doit correspondre à ce qui existe dans les faits ».

§Forces gaspilléesS’il ne jette pas la pierre aux Eglises dans une situation financière difficile, Michel Kocher, de son côté, rappelle que l’un des risques de cette dispersion consiste à voir rapidement disparaître ou s’épuiser une portion de l’offre, « parce qu’il ne suffit pas de mettre trois éléments en ligne pour que ça marche. En terme de visibilité, le monde virtuel n’échappe pas aux règles de prééminence de notre époque. Certains seront vite largués et une partie de ce gros déploiement d’énergie sera perdu. C’est dommage ».

Prenons une exemple: le site vaudois questiondieu.com en pleine déconfiture. Les Vaudois réfléchissent actuellement à une refonte globale de leur site, tombé en léthargie depuis des mois : « Graphiquement, nous avions choisi d’attendre les contours d’une ligne graphique commune. Celle-ci n’est plus à l’ordre du jour et nous nous retrouvons très en retard », reconnaît Pierre Marguerat, le responsable de l’information.

Webmaster de l’Eglise vaudoise, Gérard Jaton est aussi de ceux qui regrettent l’absence d’une vraie volonté au niveau romand. « La logique d’un média comme Internet va pourtant davantage dans ce sens que vers la multiplication des petits sites ». C’est donc en solitaires que Gérard Jaton et ses collègues réfléchissent à un contenu plus grand public, capable d’accrocher l’internaute de passage.

§Serveur commun à l’étudeAccusés de figurer parmi les fossoyeurs de cette toile romande, notamment parce leur site a ouvert un jour après protestant.ch, les Neuchâtelois plaident non coupables. « Nous étions au travail avant la décision de redonner vie au portail romand. Après, c’est vrai, chacun a fait ses choix », précise le secrétaire général Werner Alder. Ainsi, n’utilisant pas le même logiciel que protestant.ch, l’Eglise de Neuchâtel ne peut pas pour l’instant bénéficier des outils statistiques mis en place et ne sait donc pas très bien qui vient se balader sur ses pages. « De toute façon, plaide Werner Alder, les gens viennent avant tout sur le Net chercher des informations locales ».

L’affirmation en ligne d’un protestantisme romand fort n’est donc pas pour tout de suite. En revanche, techniquement, le projet d’un serveur unique partagé par les différents partenaires francophones (Eglises mais aussi organismes et institutions) pourrait bien aboutir. Gérard Jaton explique: « Tout le monde n’est pas hébergé au même endroit. Ce qui signifie qu’actuellement si le responsable d’un centre social protestant introduit un texte sur le nouveau site commun des CSP (www.csp.ch), ces renseignements ne sont pas automatiquement disponibles sur les pages de l’Eglise cantonale à laquelle il se rattache ». Un non-sens provoqué par cet éparpillement qui coûte cher. L’idée serait donc que les différents partenaires se partagent un seul serveur. Le concept fait son chemin, mais bute sur certaines inconnues. Parmi elles, une incertitude financière annoncée: qui paiera les frais de maintenance ?