Le boum de la psychogénéalogie fait place aux ancêtres

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Le boum de la psychogénéalogie fait place aux ancêtres

14 février 2003
Les ancêtres ont déboulé dans nos vies avec l’engouement actuel pour la psychogénéalogie
Cette approche thérapeutique traque les loyautés invisibles, les identifications inconscientes et répétitives, pour venir à bout des secrets de famille qui peuvent empoisonner plusieurs générations. Dans « J’ai mal à mes ancêtres », Patrice van Eersel et Catherine Maillard font le point sur cette théorie transgénérationnelle contemporaine, pourtant déjà inscrite dans la Bible, puisque il y est dit que les fautes des pères rejaillissent immanquablement sur trois, voire quatre générations ! Face au choc angoissant du futur et la survie de notre culture, voire de notre planète, beaucoup font appel au grand livre des comptes familiaux qu’a imaginé le psychanalyste hongrois Yvan Boszormenyi-Nagy et à la « théorie de la constellation » du psychanalyste allemand Bert Hellinger pour réinjecter de l’harmonie dans le système familial, en restituant à chacun sa place par rapport aux autres. Car il n’y a rien de plus douloureux et lourd à porter qu’un ancêtre exclu dans le passé, dont on a gommé ou travesti la vérité, et qui est mort sans avoir pu régler ses plus gros problèmes émotionnels et psychiques. Il devient ce que le psychanalyste Nicolas Abraham a appelé « un fantôme », qui hante la psyché familiale ou collective. Ce fantôme, il le définit comme « une pathologie de l’inconscient qui se transmet d’inconscient à inconscient dans les relations de filiation ». La théorie laisse sceptiques les scientifiques qui ne croient pas à la communication d’âme à âme, puisque cette dernière n’existe pas pour eux.

Pour Didier Dumas, psychanalyste dans la lignée de Françoise Dolto, la transmission est à l’œuvre dans la psyché du fœtus et du petit enfant dans ce qu’il appelle l’activité mentale originaire. Il rappelle que la psyché individuelle ne se forme que vers trois ans, et que jusque-là le bébé vit dans une psyché communautaire qui est celle de sa famille. Cette activité psychique permet à l’enfant de dupliquer les structures mentales de ses parents, d’en reproduire la langue. Ce faisant, il duplique leurs fonctionnements mentaux.

Le psychanalyste français a essayé pour sa part de percer le sens originel des mythes bibliques, rappelant que tout ce que la psychanalyse transgénérationnelle a découvert était déjà inscrit dans la Bible. Il rappelle que Dieu s’y définit comme l’instance responsable du fait que les fautes des pères se transmettent sur trois ou quatre générations. Or, fait-il remarquer, pour soigner un enfant psychotique, il faut remonter sur trois générations. Pour lui, la Bible est un livre qui fonde le patriarcat et le rôle des patriarches est de transmettre sans le faire dépérir, le souffle divin. Comme ce souffle, c’est la parole, la faute ou le péché y sont présentés comme un manque à parler, une absence de parole qui se transmet sur un mode semblable à celui du « fantôme ».A sa façon, la psychogénéalogie invite chacun à respecter ses ancêtres pour mieux leur pardonner et s’en libérer. Une façon en quelque sorte, d’utiliser sa famille à bon escient.

§« J’ai mal à mes ancêtres , la psychogénéalogie aujourd’hui », Patrice van Eersel,Catherine Maillard, 195 pages, éd. Albin Michel.