Les dix employés d'une radio malgache toujours derrière les barreaux

légende / crédit photo
i
[pas de légende]

Les dix employés d'une radio malgache toujours derrière les barreaux

17 juin 2010
.

A Antananarivo, les journalistes de Radio Fahazavana, média proche de l’Eglise réformée de l'île (FJKM), sont emprisonnés depuis un mois. Les convocations de certains pour « une enquête approfondie » au tribunal ont débuté. Les conditions de détention s'avèrent pénibles.

Par Samuel Ramuz

« Ils sont traités de manière correcte. » Les nouvelles reçues mercredi par Jacques Küng, secrétaire romand de DM-échange et mission, rassurent. Elles proviennent d'Antananarivo où un de ses délégués sur place est entré en contact avec un pasteur de la FJKM, qui a pu rendre visite aux détenus.

« Deux d'entre eux ont déjà été convoqués pour une enquête approfondie au tribunal », a précisé à ProtestInfo Théodore Randriamanantena, l'ancien directeur de Radio Fahazavana. L'Eglise, via cette radio, emploie et salarie les journalistes et techniciens incarcérés depuis près d'un mois.

« Effectivement, les convocations sur la base de photos ont débuté », abonde, par SMS, l'envoyé de DM-échange et mission à Madagascar, Jean-Daniel Peterschmitt. Les photos en question, en mains de la justice malgache, montrent certains journalistes et techniciens en train de suivre une manifestation de policiers.

« En réalité, précise l'ex-directeur de la radio malgache, ils faisaient simplement leur travail. » L'homme, aujourd'hui installé à Paris, ne comprend pas que le gouvernement ne s'en prenne pas directement aux responsables de la FJKM.

Eglise interpellée

En effet, l'ancien président, Marc Ravalomanana, est membre de la principale Eglise réformée du pays. Encore en exercice, il en avait même été le vice-président du Conseil synodal. Du coup, même si certains membres de la FJKM sont engagés dans un processus de dialogue et de résolution des conflits, l'Eglise cristallise certaines récriminations de l'actuel gouvernement, dirigé par l'ex-maire de la capitale, Andry Rajoelina.

 

En réalité, précise l'ex-directeur de Radio Fahazavana, les journalistes et les techniciens faisaient simplement leur travail.

Selon l'analyse de M. Randriamanantena, il est plus facile pour le gouvernement de s'en prendre aux journalistes qu'aux dirigeants de l'Eglise qui les emploie. Engager un avocat mandaté par la FJKM pour défendre la cause des détenus - et qui assiste d'ailleurs aux « entretiens approfondis » - est nécessaire, mais non suffisant, estime encore l'ancien directeur.

Il aurait souhaité que l'Eglise en fasse davantage pour défendre les journalistes, incarcérés selon lui dans des conditions pénibles (saleté, gale, surpopulation carcérale). Ces derniers peuvent toutefois profiter de l'aide de leur famille respective pour leur fournir des repas.

Grave crise politique

Les dix collaborateurs arrêtés le 20 mai et déférés devant le procureur ont été inculpés « d’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat » le 29 mai. Le matériel des studios de Radio Fahazavana avait également été saisi.

Madagascar est plongée dans une grave crise politique depuis fin 2008, qui a conduit à l'éviction du président Marc Ravalomanana en mars 2009. Les violences récentes ont entraîné la mort d'un pasteur et conduit huit autres à se cacher.

 

A LIRE AUSSI
Voir également le premier article de ProtestInfo à ce sujet: Madagascar: dix journalistes incarcérés depuis le 20 mai