Les réformés rejettent l'initiative sur le renvoi, mais sont divisés sur le contre-projet

légende / crédit photo
i
[pas de légende]

Les réformés rejettent l'initiative sur le renvoi, mais sont divisés sur le contre-projet

15 octobre 2010
© Laurent Guiraud/2009 Selon les estimations fournies au Conseil des Etats, le contre-projet conduirait à doubler le nombre d’expulsions. Elles atteindraient ainsi le nombre de 800 par année. L’initiative de l’UDC, elle, porterait cette moyenne à 1500.

La FEPS appelle les citoyens à rejeter l'initiative sur le renvoi des criminels étrangers, mais à dire oui au contre-projet du Conseil fédéral le 28 novembre prochain. En revanche, l'EPER, l'oeuvre d'entraide protestante, et les Centres sociaux protestants (CSP), disent non aux deux objets. Quant aux Eglises romandes, aucune d'entre elles ne donne de mot d'ordre pour l'instant.


Selon la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS), cette initiative est inconciliable avec les fondements humanitaires chrétiens de l’Etat constitutionnel libéral, indique-t-elle dans un communiqué vendredi. L'organisation réformée se montre aussi critique face au contre-projet du Parlement, mais recommande de l’accepter pour barrer la route à l’initiative.

La FEPS, l'EPER et les CSP considèrent qu'une acceptation de l’initiative entraînerait une violation de la Constitution fédérale, ainsi que du droit international, car cette initiative bafoue des principes de l’Etat de droit, ainsi que le principe de proportionnalité. Par exemple, une effraction ou un vol aboutirait au retrait de l’autorisation de séjour, mais pas une peine de plusieurs années de prison.

De plus, en raison des accords de libre circulation avec l’Union européenne, les étrangers de pays hors UE seraient discriminés, puisqu’ils seraient les seuls touchés par un éventuel renvoi. La Loi sur les étrangers, entrée en vigueur début 2008, met aujourd’hui déjà à la disposition des autorités des instruments efficaces comme l’expulsion, l’interdiction d’entrer en Suisse et la révocation des autorisations d’établissement.
Divergences sur le contre-projet Si la FEPS soutient le contre-projet, elle constate toutefois avec préoccupation que même le contre-projet ne transmet qu’une image négative de la migration. Il serait problématique que cette perception négative entre dans la Constitution fédérale.

Le rejet de l’initiative populaire « Pour le renvoi des criminels étrangers » revêt toutefois une importance primordiale pour le Conseil de la FEPS, même si le contre-projet suscite des critiques. Pour empêcher l’acceptation de l’initiative populaire, le Conseil de la FEPS recommande donc d’accepter le contre-projet, et de le privilégier dans la question subsidiaire.
EPER-CSP: rejet du contre-projet

Pour l'EPER et le CSP en revanche, le contre-projet doit être rejeté. Selon l'EPER, le contre-projet, compatible avec le droit international, est certes plus nuancé et moins radical que l'initiative, mais son adoption donnerait l'impression que la criminalité des étrangers résidant en Suisse est un problème si grave dans le pays qu'elle nécessite d'entériner la lutte contre ce fléau dans la Constitution fédérale.

Toujours selon l'oeuvre d'entraide, avec le système en place actuellement, rien n'exclut de faire quitter le pays aux personnes condamnées lorsqu'elles ont commis des délits graves, mais la procédure de renvoi n'a pas besoin d'une base constitutionnelle.

Les CSP romands de Genève, Lausanne et Neuchâtel sont sur la même ligne. Le CSP Berne-Jura se prononcera la semaine prochaine. Il pourrait être sur la même ligne que la FEPS. Selon les CSP romands, « contrairement à ce que veut nous faire croire la propagande de l'UDC, les criminels étrangers sont aujourd'hui déjà systématiquement renvoyés de Suisse lorsqu'ils n'ont pas de liens avec le pays et, même lorsqu'ils ont des liens étroits avec la Suisse (permis C, conjoint ou enfants suisses), ils sont renvoyés si le délit commis a été puni d'une peine de prison supérieure à deux ans. »

Selon les CSP, « la double peine (prison + exil) a été supprimée du droit pénal il y a quelques années seulement, car on la considérait comme barbare dans un Etat moderne. Il est dès lors vraiment préoccupant que personne ne se souvienne des motifs de cette suppression au moment de réinstaurer un système beaucoup plus répressif que celui qui a été aboli. De plus, seuls les ressortissants d'Etats tiers seront l'objet de ce durcissement programmé. »

Eglises romandes : pas de mot d'ordre

Du côté des Eglises romandes, Genève et Vaud développent un argumentaire pour permettre aux citoyens de faire leur choix de façon documentée. Fribourg et Berne ne se prononcent pas en général sur des scrutins nationaux. Neuchâtel et Valais n'ont pas encore pris formellement de décision sur ce point.