«La mort est toujours un tabou»

Lytta Basset / © Raphaël Zbinden/Cath.ch
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Lytta Basset
© Raphaël Zbinden/Cath.ch

«La mort est toujours un tabou»

Rencontre
Auteure prolifique, la philosophe et théologienne Lytta Basset ne cesse d’écrire, d’enseigner et d’accompagner spirituellement des personnes. Ce 6 mars, elle est présente à Genève pour parler du suicide.

En 2001, Lytta Basset vit une cassure magistrale avec le suicide de son fils Samuel, âgé de 24 ans. De cette terrible épreuve surgit cinq ans plus tard Ce lien qui ne meurt jamais (2007, Albin Michel), rédigé sur la base d’un journal intime tenu durant son deuil. Ouvrage qui rencontre un grand écho et décuple les demandes de conférences de celle qui enseigne alors la théologie pratique à l’Université de Lausanne, puis de Neuchâtel 

Avant ce drame, les questions existentielles passionnaient déjà Lytta Basset. Aujourd’hui à la retraite, elle a d’abord fait des études de philosophie. Les textes bibliques l’intéresseront plus tard. Son stage pastoral dans la paroisse de Champel suscitera chez elle un véritable coup de foudre pour le ministère. En cette froide matinée de février, celle qui a exercé le pastorat durant dix-sept ans à Genève nous reçoit dans sa maison de Préverenges (VD). L’entretien tourne évidemment autour de la mort, question toujours taboue aujourd’hui. «Il n’y a qu’à penser à ces cafés mortels, ces festivals de la Toussaint… Leur existence indique que la mort ne va pas de soi, qu’elle est très évacuée de notre société. Ce qui me chagrine, c’est qu’en la mettant de côté, c’est aussi la vie que l’on écarte. Dans certaines familles, il n’est d’ailleurs pas possible de prononcer le prénom d’un disparu. On ne se rend pas compte du poids que cela laisse. Nous avons toujours parlé de Samuel, même à nos petits-enfants», souligne Lytta Basset.

Des signes du Vivant

La théologienne franco-suisse parle de son expérience personnelle lors de cette rencontre à l’Antenne LGBTI, le bureau cantonal de l’Eglise protestante de Genève (EPG) pour les questions LGBTIQ+. Le thème du suicide concerne beaucoup ce milieu. Dans son approche, Lytta Basset défend une certaine liberté pour ceux qui décident de se supprimer. «Je n’ai jamais vu de condamnation à vivre, ni dans la Bible ni dans la tradition chrétienne.» 

La religion catholique a condamné le suicide. Et les protestants ont toujours refusé ce qui touche au monde invisible. Son dernier livre, Cet Au-delà qui nous fait signe (2022, Albin Michel), relate justement ses perceptions avec son fils. Par l’intermédiaire d’une inconnue, elle a reçu des messages d’amour lumineux qui l’ont aidée à retrouver goût à la vie. Elle peut ainsi témoigner qu’il est possible de se remettre de la mort d’un enfant. Souvent, on ne la croit pas. «C’est dommage, car c’est en phase avec la résurrection et les apparitions de Jésus aux disciples. Mais les protestants ont été conditionnés à se fermer les yeux et les oreilles aux signes que nous fait le Vivant. Ce sont souvent les plus désespérés», souligne Lytta Basset. Dans les accompagnements spirituels, nombre de gens lui témoignent de leur joie de se sentir en proximité avec un proche disparu. C’est avant tout le vivant – humain, animal, plante… – qui connecte au Vivant, à la Présence; la théologienne en est persuadée et c’est ce qui la motive à poursuivre sa transmission.

Côté pratique 

Jeudi 6 mars, à 18h30. Rencontre avec Lytta Basset: «Se supprimer ou choisir la vie malgré tout?», Antenne LGBTI Genève, rue Jean-Dassier 11. 

En avril, parution de Paroles de feu. Quand la Bible nous scandalise chez Albin Michel.