Comment l'Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) prend la main sur le recensement des protestants

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Comment l'Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) prend la main sur le recensement des protestants

20 août 2012
L'EERV veut connaître ses quelque 330 000 paroissiens et centraliser les statistiques de ses actes ecclésiastiques (mariages, baptêmes, confirmations). Son lien avec l'Etat l'y autorise.


Baptisé AIDER, pour Annuaire informatique de l'Eglise réformée, ce vaste fichier devrait sortir des limbes en 2013. Coût annoncé pour son développement: 300 000 francs. C'est le statut d'institution de droit public des deux grandes Eglises cantonales qui leur permet aujourd'hui de se doter d'un tel outil, en lien étroit avec l'Etat. Les catholiques ont le leur depuis 2011.

« Ces trente dernières années, les 84 paroisses ont le mérite de s'être donné les moyens de constituer des fichiers informatiques plus ou moins performants », explique Xavier Paillard, conseiller synodal en charge du dossier. Du coup, chacune dispose aujourd'hui de son fichier « maison », quand il y en a un. Ce qui impose parfois aux ministres (pasteurs et diacres) d'improviser pour, par exemple, convoquer une volée de catéchumènes.

Données étatiques pas fiables

A la traîne, l'Eglise cantonale a donc pris le taureau par les cornes. Première étape, en cours depuis janvier: collecter et standardiser les données des paroisses. « Nous allons droit dans le mur, glisse un connaisseur du dossier. Nous devrions constituer un fichier à neuf ! » Mais ce n'est pas à l'agenda. L'EERV tient à garder le plus de données possibles issues du terrain avant la grande bascule dans AIDER.

Car dans un deuxième temps l'Etat, lui, ne fournira à l'Eglise que les protestants déclarés (lire ci-dessous). Il le fera via le Registre cantonal des personnes (RCpers), qui se base lui-même sur les données transmises par le Contrôle des habitants des communes. Or des tests, notamment dans la région lausannoise, ont montré que ces données n'étaient pas forcément fiables. Le développement du programme, confié à l'entreprise Epsitec, prend du coup plus de temps que prévu.

Le casse-tête de la filiation

De plus, l'Etat est soumis à des directives strictes en matière de protection des données personnelles. « Nous ne pouvons ni transmettre le numéro AVS, ni les liens de filiation », confirme Eric Golaz, chef du Service des communes et des relations institutionnelles (Secri). Autrement dit, l'EERV va au-devant d'un joli casse-tête pour reconstituer les familles, qui ne correspondent pas tout le temps, et de loin, aux foyers...

De leur côté, les paroisses, pour l'heure, sont dans l'expectative. Certaines craignent une professionnalisation des secrétariats induite par la gestion du nouveau fichier. « Il était grand temps », note au contraire un pasteur broyard.

D'autres lieux d'Eglise redoutent une perte d'autonomie. « Chaque paroisse aura la possibilité d'introduire dans AIDER des activités, des groupes qui lui sont propres et des personnes supplémentaires. Elle aura la pleine gestion de son fichier », rassure Xavier Paillard. La distribution du mensuel bonne nouvelle aux 140 000 ménages protestants fera office de test grandeur nature. S. R.


Les Eglises se mobilisent pour contrer la chute


Seuls les citoyens déclarés comme protestants au Contrôle des habitants seront transmis à AIDER. Or de moins en moins de personnes le font au moment de s'enregistrer dans une commune. « Fournir cette donnée n'est pas obligatoire », confirme Eric Golaz, chef du Secri. « C'est une inquiétude pour les Eglises, mais aussi pour l'Etat, qui n'a plus d'accès à une information statistique pour radiographier le paysage religieux », explique Xavier Paillard.

Du coup, et en partenariat avec l'Etat, les Eglises catholique, réformée et la Communauté juive se mobilisent pour renverser la tendance (-10 % de protestants en dix ans pour l'EERV). Depuis janvier, elles mettent donc à disposition des Contrôles des habitants un petit document qui précise, entre autres, la gratuité de la déclaration de l'appartenance religieuse dans le canton de Vaud. Les communes les ont bien acceptés.

De plus, à cause d'un changement de processus administratif, il n'est plus possible d'inscrire la confession d'un enfant au moment de sa naissance. « Depuis environ deux ans », estime M. Paillard, qui imagine sensibiliser certains députés pour qu'ils déposent une motion au Grand Conseil. Aujourd'hui, seule la confession de la mère est prise en compte et transmise à l'état civil. S. R.