Comment rendre l’incarcération bénéfique?

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Comment rendre l’incarcération bénéfique?

Laurence Villoz
20 mars 2014
L’état psychique des prisonniers passe sous la loupe de la Ligue suisse des droits de l’homme, dans une rencontre mardi 25 mars, au Buffet de la gare à Lausanne. Dans le cadre du projet Foucault, la prison aujourd’hui, organisé par le groupe Infoprisons, des débats, conférences et projections de films questionneront la situation carcérale, du 19 au 30 mars.

«Les personnes avec des problèmes psychiques doivent être traitées comme des personnes malades», explique Patrick Herzig, président de la section vaudoise de la Ligue suisse des droits de l’homme (LSDH-VD). L’Association rend visite aux détenus qui en font la demande. Elle a constaté qu’un grand nombre de prisonniers présentait des symptômes psychiatriques dont la prise en charge n’était pas toujours adéquate.

La prison peut-elle devenir un lieu de soin? Un psychiatre, un avocat et un professeur de l’Université de Lausanne débattront des troubles psychiatriques en prison, mardi 25 mars, au Buffet de la gare à Lausanne. «Toute personne qui commet un délit sérieux a un problème psychique», estime Patrick Herzig. «Ces personnes ont besoin d’être suivies, encadrées et de pouvoir suivre une formation adaptée pour leur permettre de se réintégrer quand elles sortent».

«Mais comment apprendre aux gens à se réintégrer en les tenant à l’écart», s’interroge Patrick Herzig qui constate que les prisons, dans leur forme actuelle, ne répondent pas aux problèmes comportementaux et sociaux des détenus. «Les prisons semi-ouvertes, comme l’établissement de Witzwil dans le canton de Berne, donnent des résultats très positifs». Cet établissement, qui n’accueille pas de détenus qualifiés de dangereux, comporte des sections ouvertes et forme ces bénéficiaires aux travaux agricoles. «Ce genre de structures rencontre malheureusement beaucoup d’oppositions au niveaux politique et sociétal, sans compter leurs coûts qui sont plus élevés».

Augmentation des problèmes psychiques

Selon le président de la LSDH-VD, l’augmentation du taux de personnes souffrant de troubles psychologiques en prison est essentiellement due à la surpopulation, à la provenance des détenus et à la perception des troubles psychiques dans la société actuelle. «La surpopulation génère des frictions et des tensions entre les détenus augmentant ainsi l’apparition de problèmes psychiques».

De plus, la majorité des détenus, en Suisse, viennent de l’étranger et trainent avec eux «un lourd passé émotionnel». «Beaucoup d’entre eux ont quitté un pays en guerre ou ont vécu des situations de conflits». Parallèlement, «on est beaucoup plus attentif aux troubles psychiques aujourd’hui qu’il y a cinquante ans».

Foucault, la prison aujourd’hui

Les réflexions du philosophe français, Michel Foucault, sur l’incarcération sont-elles toujours d’actualité? «Notre projet, Foucault, la prison aujourd’hui, est un pont entre le passé et le présent», explique Muriel Testuz du groupe Infoprisons. Le groupe romand et plusieurs partenaires ont organisés des projections de films, des discussions et des tables rondes pour s’interroger sur les thèses de Michel Foucault, décédé il y a 30 ans cette année.

Infoprisons

Créé en 2010, suite au décès du prisonnier des Etablissements de la plaine de l’Orbe, Skander Vogt, dans l’incendie de sa cellule, le groupe Infoprisons est une plateforme d’échanges d’informations sur la réalité carcérale. Par le biais d’un bulletin trimestriel, ce groupe favorise les échanges entre les prisonniers, le personnel pénitentiaire et le public. Au travers d’articles, de témoignages et d’interventions parlementaires, il suscite le débat sur les conditions et les motifs de détentions.
Le groupe est constitué, entre autres, d’une journaliste, d’une assistante sociale et de l’ex-conseillère nationale Anne-Catherine Menétrey-Savary. Tous les membres y travaillent bénévolement.