Selon un historien, la crise ukrainienne a rapproché les Eglises

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Selon un historien, la crise ukrainienne a rapproché les Eglises

Karsten Packeiser
16 décembre 2014
De l’avis de l’historien de l’Eglise Oleh Turij, les confessions chrétiennes traditionnellement divisées en Ukraine se sont rapprochées dans le contexte de la crise prolongée qui affecte le pays.

Photo: Le monastère de l’Eglise orthodoxe d’Ukraine Saint-Michel-au-Dôme-d’Or à Kiev. CC(by-nc) Vlad Mikhailov

, Mayence, EPD/Protestinter

Dès le début des manifestations de protestation sur la place Maïdan (place de l’Indépendance) à Kiev, les Eglises ont essayé, par des déclarations communes, d’empêcher une escalade de la violence, a indiqué le pro-recteur de l’Université catholique ukrainienne de Lviv à l’agence de presse protestante allemande EPD. Même l’Eglise orthodoxe ukrainienne liée à Moscou s’affirme clairement en faveur de l’unité nationale et de l’indépendance. Aucun de ses évêques ne soutient l’«agression russe» contre le pays.

Dans les communautés liées à Moscou, les conflits internes s’intensifient, selon Oleh Turij. En Russie, l’Eglise mère joue pendant ce temps un rôle de «soutien idéologique» des instances dirigeantes. C’est pourquoi le pro-recteur peut comprendre que le gouvernement ukrainien ait interdit l’entrée dans le pays à des représentants d’Eglise russe: «Nous devons comprendre la situation: une guerre est en cours, et ce n’est pas nous qui l’avons déclenchée.»

La diversité confessionnelle de l’Ukraine, souvent considérée comme un signe de la division du pays, ne doit pas être vue seulement comme un inconvénient ou un problème, explique Oleh Turij, venu à Mayence pour participer à une école doctorale de l’Institut Leibniz d’histoire européenne. Les initiatives des gouvernements de Kiev d’établir après l’indépendance une Eglise nationale unique n’avaient guère de chances de réussir: «Essayer de créer quelque chose en exerçant des pressions ne peut que susciter de nouvelles divisions.»

L’Eglise grecque catholique d’Oleh Turij, interdite au temps du régime soviétique, s’efforce depuis des années de recentrer le dialogue entre les Eglises, très politisé, sur les questions théologiques et les besoins des croyants de la base. L’Eglise grecque catholique d’Ukraine occidentale reconnaît le pape de Rome comme chef, mais suit les autres Eglises orthodoxes en ce qui concerne la tradition et le rite du service divin.

Ainsi, ses prêtres sont autorisés à se marier. «Dans l’Eglise latine, la question du célibat n’est pas une question de foi», explique Oleh Turij, qui met en garde en même temps contre l’idée de voir dans l’abolition du célibat des prêtres un remède universel aux difficultés de l’Eglise. Il n’y a pas non plus, dans l’Eglise grecque catholique, de débat sur l’ordination des femmes à la prêtrise: «Le jour où l’ordination des femmes apparaîtra comme le problème le plus urgent sur notre liste de priorités, nous serons heureux.» Les membres de l’Eglise grecque catholique ukrainienne se trouvent avant tout dans la région de la Galicie anciennement polonaise.

Le groupe de chrétiens le plus nombreux dans le pays est celui des membres de l’Eglise orthodoxe ukrainienne toujours liée à Moscou, mais qui jouit d’une certaine autonomie par rapport à l’Eglise mère. En outre, après la désagrégation de l’Union soviétique, un Patriarcat de Kiev a été mis en place en Ukraine, qui cependant n’est, pour l’heure, pas reconnu par la communauté des Eglises orthodoxes.

Il y a encore dans le paysage ecclésial une autre Eglise orthodoxe autonome, plus petite, ainsi que des catholiques et un nombre relativement important de membres d’Eglises libres protestantes.