Les Américains craignent le terrorisme, les fusillades et souvent aussi… les musulmans

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Les Américains craignent le terrorisme, les fusillades et souvent aussi… les musulmans

Cathy Lynn Grossmann
18 décembre 2015
Terrorisme et fusillades inquiètent désormais un nombre écrasant d’Américains. Et l’appartenance religieuse des tueurs influence la façon dont ils sont perçus.

Photo: © RNS/Public Religion Research Institute

(RNS/Protestinter)

Selon une nouvelle étude, 96% des adultes aux Etats-Unis voient le terrorisme comme un problème important ou critique. Ce sondage a été mené à la suite des attentats de San Bernardino en Californie perpétrés par deux musulmans radicalisés. Les fusillades sont considérées comme une préoccupation importante ou critique par 94% des Américains, toujours selon ce sondage du Public Religion Research Institute (PRRI)/Religion News Service (RNS).

La menace est prise très personnellement:

  • Il y a deux ans, seulement 53% des personnes interrogées avaient déclaré au PRRI que le terrorisme était une question critique. Aujourd’hui, c’est 75%
  • Près de la moitié des personnes interrogées (47%) se disent très ou un peu inquiète que quelqu’un de leur famille soit victime du terrorisme, contre 33% en 2014.
  • Deux tiers des répondants (67%) considèrent les fusillades comme des préoccupations critiques, auxquels s’ajoutent 27% pour qui il s’agit d’une inquiétude importante.

Les informations concernant les différentes fusillades de 2015, dont Charleston (Caroline du Sud), Chattanooga (Tennessee), Roseburg (Oregon), Paris et désormais San Benrnardino, peuvent avoir influencé les réponses, selon Dan Cox, directeur de recherches au PRRI. «Le niveau de crainte semble extrêmement élevé, compte tenu de la probabilité que cela arrive à un individu donné. Cela démontre que le sentiment d’anxiété s’est fortement installé au sein de la population et que les gens réagissent à la rhétorique politique actuellement exacerbée», analyse le chercheur. Ces temps, les musulmans sont au centre des actualités les plus brûlantes et des discours politiques les plus répugnants.

Selon le FBI, les terroristes de Californie, Tashfeen Malik et Syed Rizwan Farook, ont été radicalisés par Daech afin de terroriser les Etats-Unis en fauchant les collègues de Farook. Selon Donald Trump, candidat à la candidature républicaine pour la présidentielle, a fulminé pendant des semaines contre l’accueil de réfugiés syriens aux Etats-Unis (son appel à interdire les musulmans d’entrée sur le territoire américain a été lancé après que le sondage a eu lieu). Son rival Ben Carson a déclaré que l’islam n’est pas en accord avec les valeurs américaines.

L’enquête PRRI/RNS montre que la virulence des discours politiques pourrait avoir influencé les Américains sur la question de savoir si les musulmans sont perçus comme «une part importante de la communauté religieuse du pays.» Dans l’ensemble, c’est le cas pour 57% des Américains. Cependant, les opinions concernant les biens-faits d’une telle diversité religieuse dépendent de l’appartenance religieuse et du sentiment personnel de peur du répondant.

Ceux pour qui les musulmans sont importants pour la vie religieuse des USA représentent:

  • Près de 7 personnes sans identité religieuse sur 10 (67%)
  • La majorité des non-blancs protestants (56%) et catholiques (55%)
  • Mais seulement la moitié des blancs protestants issus des Eglises historiques (51%) et évangéliques (47%)

Les juifs, les musulmans et les autres minorités religieuses représentaient des groupes trop peu importants dans l’échantillon pour être analysés statistiquement. L’enquête a été menée par des interviews téléphoniques auprès de 1003 adultes entre le 2 et le 6 décembre. La marge d’erreur est de 3,7% pour les résultats globaux, un peu plus élevés pour les analyses de sous-groupes.

«Malgré la rhétorique brûlante que nous entendons de la part de personnes comme Donald Trump», estime Dan Cox, «la majorité du public (53%) est en faveur de l’accueil des réfugiés syriens, s’ils passent au travers des contrôles de sécurité stricte.» Parmi ceux qui s’y opposent, la majorité (57%) invoque des craintes liées à la sécurité.

Moins de la majorité des protestants –qu’ils soient noirs ou blancs; évangéliques ou issus d’Eglises historiques– se déclarent favorables à l’entrée sur le territoire américain de réfugiés syriens. Par contrastes, 57% des catholiques et 60% des personnes ne se réclamant d’aucune identité religieuse se disent en faveur d’un tel accueil.

Les statistiques révèlent quelques contradictions. La grande majorité des Américains (83%) déclarent ne rien ou peu connaître de la religion et des pratiques des musulmans; et 62% déclarent qu’ils n’ont jamais ou rarement eu de conversation avec quelqu’un dont ils savaient qu’il était musulman. Malgré cela, 47% en tout disent que les valeurs de l’islam sont en contradiction avec la façon de vivre aux Etats-Unis. Plus de quatre personnes sur dix (43%) ont l’opinion inverse alors que 10% n’ont pas d’opinion ou refusent de répondre. Enfin, 53% déclarent que les musulmans n’en ont pas fait assez pour combattre l’extrémisme dans leur communauté contre 46% en 2011.

L’étude démontre également que l’attitude des Américains varie suivant l’identité religieuse d’un tueur. Pour trois personnes sur quatre (75%), une personne qui se dit chrétienne et «commet un acte de violence au nom du Christ, n’est pas vraiment chrétienne». Alors qu’ils ne sont que la moitié (50%) à considérer qu’une personne qui se dit musulmane et commet des actes de violence au nom de l’islam «n’est pas vraiment musulmane».