Chrétiens pro-Trump ?

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Chrétiens pro-Trump ?

Reto Gmünder
17 novembre 2024
Retour sur l’élection présidentielle américaine. Un billet de Reto Gmünder, pasteur régional de l’arrondissement jurassien des Églises réformées Berne-Jura-Soleure, paru dans le Journal du Jura, le samedi 16 novembre.

Ça y est ! Les États-Unis ont donc élu leur président, le mardi 5 novembre dernier. Comme beaucoup, j'ai été surpris par le choix porté sur l’ancien président milliardaire pour le moins controversé. Ce qui m'a le plus choqué, cependant, fut le soutien massif et affiché de certaines Églises et de pasteurs évangéliques au candidat républicain, au nom de la foi chrétienne. En tant que chrétien et pasteur, cela me trouble profondément.

Je comprends certes que des croyants se sentent désorientés face à une société de plus en plus sécularisée et perçoivent le besoin de protéger les valeurs chrétiennes dans un monde jugé hostile. Mais comment peut-on imaginer y parvenir en défendant le port d'armes, en refoulant des migrants et en restreignant les droits des minorités ? La foi chrétienne repose sur un Sauveur qui a lavé les pieds de ses disciples, accueilli les marginalisés et prêché l'amour des ennemis.

Je comprends aussi le désir de défendre le caractère sacré de toute vie, considérée comme un don de Dieu. Mais croire qu'une interdiction suffit à faire disparaître l'IVG relève de la naïveté. Que dire de la dignité des femmes contraintes par des situations insoutenables ? La sacralité de la vie ne devrait-elle pas inclure la protection des plus vulnérables, des pauvres, des migrants, des opprimés et de toute la Création, comme l'Évangile nous y invite sans réserve ?

Enfin, je conçois que l'on puisse souhaiter un président sensible aux préoccupations des Églises. Mais Donald Trump, avec ses discours de division, ses propos racistes, machistes et climatosceptiques, incarne-t-il les valeurs chrétiennes ? Jésus s'opposa fermement à l'hypocrisie des élites religieuses de son temps, dénonçant ceux qui utilisaient les institutions pour servir leurs propres intérêts.

Ainsi, lorsque des Églises et des pasteurs voient dans les résultats des élections américaines un signe d’intervention divine, je m'interroge sur les risques de déformation du message chrétien. Peut-être devrions-nous nous demander si le défi principal pour l'Évangile aujourd'hui ne réside pas tant dans sa perte d’influence que dans son altération, quand sa prédication s'éloigne si radicalement de l’appel à l'amour, à la justice et à la compassion qui le fonde.