Ils se font élire pour porter leur voix plus loin

©iStock
i
©iStock

Ils se font élire pour porter leur voix plus loin

Réalité concrète
Les jeunes ont de l’intérêt pour la politique des Eglises, comme en témoigne la nouvelle composition du Synode vaudois. Mais les obstacles demeurent.

Onze délégués sur 87. C’est ce que représentent les moins de 30 ans, membres ou responsables de groupes de jeunes régionaux, au sein du Synode de l’Eglise réformée vaudoise pour la législature qui vient de démarrer. Ce chiffre est unique en Suisse romande. Pourtant, il n’est pas le résultat d’une initiative coordonnée, mais d’une série de prises de conscience individuelles.

«Les responsables de groupes et les ministres jeunesse se retrouvent une fois par année pour un week-end, explique Julien Thuégaz, responsable d’un groupe de La Côte et nouveau membre du parlement d’Eglise. A cette occasion, nous avons appris un jour une décision du Synode à propos des postes jeunesse qui a fâché certains d’entre nous. Je me suis dit: pourquoi ne pas essayer d’y aller? Et manifestement, nous sommes plusieurs à avoir eu la même idée, chacun de son côté.»

L’Eglise, un milieu «technique»

Bonne surprise pour Julien Thuégaz et ses collègues: leur candidature est accueillie avec enthousiasme. Les jeunes sont élus sans problème, tout en prenant soin de ne pas prendre leur place aux délégués sortants «qui les soutenaient beaucoup». Mais maintenant que vient l’heure de siéger, ils se confrontent à la réalité concrète d’un délibérant. «Nous nous sommes tous dit en arrivant que le Synode était un univers assez inconnu et un peu effrayant, rapporte Julien Thuégaz. Au fond, dans nos réseaux, on a peu d’infos sur son fonctionnement. Certains membres plus expérimentés nous ont dit que la première année est plutôt l’occasion d’observer et d’apprendre.»

Un diagnostic que pose aussi Marysol Charras. Cette étudiante en théologie à Strasbourg est active au sein de la Fédération luthérienne mondiale et de son Eglise en Alsace. «La politique ecclésiale, c’est technique. Il faut un réseau et connaître le mode de fonctionnement. Dans mon Eglise, plus on crie et moins on est écouté. Il faut faire passer le message par la parole, ce qui implique de se rendre vulnérable.»

La Réforme passe par la jeunesse

Malgré la difficulté inhérente au débat et aux processus institutionnels, il serait dommage de se passer de la participation des plus jeunes. «Nous estimons important que le futur de l’Eglise soit aussi décidé par les jeunes, insiste Julien Thuégaz. C’est eux, les prochains!»

Selon Marysol Charras, ils ont en plus un avantage sur leurs aînés: leur disponibilité et leur énergie. «On a inculqué aux milléniaux l’idée qu’il faut se prouver sur le plan intellectuel et faire des études avant d’être activiste. C’est une erreur. Je vois au quotidien qu’à 20 ans on a plus d’espace mental qu’à 35. Et pour faire passer des idées novatrices, il faut de la persévérance.»

L'avis de BREF

Il existe une multitudes de manières de vivre l’Eglise. A BREF, par exemple, les jeunes s’engagent et repensent le rapport à la spiritualité.

Ces idées novatrices, quelles sont-elles? Julien Thuégaz aimerait bien profiter de son siège au Synode pour plaider la cause des groupes de jeunes dans les Régions, où ils manquent parfois de visibilité et doivent jouer des coudes pour se faire une place, et offrir un vrai espace ecclésial aux jeunes adultes. Marysol Charras, de son côté, verrait bien l’Eglise sortir de son pré carré. «La Réforme du XVIe siècle a été motivée par un souci de justice sociale autant que par des problèmes théologiques. Or, notre identité protestante consiste à appeler à une réforme constante. On ne doit pas oublier notre foi et notre espoir de changer le monde. Aujourd’hui, les Eglises ont perdu leur prestance dans la société, mais elles ne cherchent pas à améliorer les choses. Il faut discuter d’actions concrètes!»