«Notre objectif, c’est d’inviter à regarder notre ville, ce qu’elle a d’insolite et tout ce qu’on ne voit plus parce que cela fait partie du mobilier urbain», explique Daniel Sepe, concepteur et organisateur des Balades théâtralisées de Genève. Pour la 8^e saison, l’association qu’il a fondée emmène les curieux les dimanches à 11h, jusqu’en novembre, dans un parcours à travers la ville et son histoire. Une vingtaine de comédiens amateurs, formés par un metteur en scène et auteur professionnel, se relaient pour donner vie à treize personnages au pied de sept statues. «Comme touriste, j’apprécie les visites guidées qui donnent un peu vie au parcours. Et comme je suis passionné de théâtre, j’ai imaginé ce concept», explique Daniel Sepe.

A Fribourg, c’est sur les pas des fantômes de son passé que l’auteure et metteure en scène Joëlle Richard a emmené le public en mars à l’occasion du Printemps de la Poésie. «Les organisateurs voulaient un événement hors les murs, et comme j’avais écrit des textes qui avaient comme thématique les souvenirs que peuvent évoquer certains lieux, le choc entre passé et présent qui peut survenir lorsque l’on revient là où l’on a vécu des expériences fortes, j’ai proposé une biographie fictionnalisée, une réflexion sur le chez-soi, autour d’une cartographie fantasmée.»

«Entre les stations, il y a une perméabilité qui n’existe pas dans le théâtre traditionnel», constate la metteure en scène. «Le comédien parlait avec le public, des gens ont pu poser des questions. Il y en a aussi qui m’ont raconté des histoires le long du récit. Pour moi, ça pousse la réflexion plus loin.» Pour autant, sortir l’art dans la rue n’est pas nouveau: «Les mystères (forme théâtrale du XVe siècle, NDLR), ça se faisait dans la rue. Notamment parce qu’il fallait que le peuple puisse avoir accès à ces histoires religieuses», rappelle-t-elle. «Puis le théâtre s’est institutionnalisé et professionnalisé».

Mis à part durant la crise du Covid, où le spectacle en balade a permis aux acteurs de simplement faire leur métier, la metteure en scène note que cette forme permet d’ouvrir le théâtre à de nouveaux publics. «Mais le risque, c’est que cela se fasse en réduisant les moyens: sans lumière, sans son, sans musique. Or c’est déjà dans ces métiers-là que l’on a tendance à couper…» dénonce-t-elle.