Les prières des Sioux ont porté leurs fruits

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Les prières des Sioux ont porté leurs fruits

Emily McFarlan Miller
6 décembre 2016
Les manifestants contre l’oléoduc qui devaient traverser le Dakota du Nord ont eu gain de cause
Le nouveau tracé évitera les terres indiennes.

Photo: Le camp d’Oceti Sakowin © RNS

, Standing rock, réserve des Sioux dans le Dakota du Nord (RNS/Protestinter)

Dans le récit de la création des Sioux, l’eau a été l’un des premiers êtres créés par le Créateur et elle est devenue une partie importante des cérémonies religieuses du peuple. Pendant une bonne partie de l’année 2016, les collines le long de la rivière Cannonball près de Cannon Ball dans le Dakota du Nord ont été transformées en une petite ville, le foyer du mouvement spirituel pour la protection de l’eau, contre la construction du pipeline Dakota Access.

Jusqu’à 8000 personnes y ont campé sous les drapeaux des 280 nations amérindiennes. Incluant des représentants des sept groupes de la Nation Sioux, qui se rassemblaient, à nouveau, pour la première fois depuis la défaite du lieutenant-colonel George A. Custer, il y a 140 ans, à Little Bighorn. Lundi 5 décembre, les services fédéraux ont annoncé qu’un nouveau tracé, prévu pour le pipeline éviterait, les sites sacrés des Amérindiens et éviterait ainsi de polluer leurs réserves d’eau potable.

La coordinatrice du camp Phyllis Young a déclaré que le mouvement a été soutenu dans une large mesure par les croyances spirituelles de la tribu, qui avait été interdites pendant plus d'un demi-siècle jusqu'à la loi de 1978 sur la liberté religieuse indienne. «Maintenant, nous sommes adultes dans notre spiritualité», a souligné Phyllis Young. «Nous avons récupéré notre spiritualité et nous avons évolué, alors maintenant nous exerçons notre liberté de religion à notre manière, de façon pacifique et dans la prière».

Un pipeline à travers des sites sacrés

Le pipeline Dakota Access qui coûterait 3,8 milliards de dollars s’étendrait sur presque 2000 kilomètres entre le Dakota du Nord et l’Illinois. Statistiquement, les pipelines sont le moyen le plus sûr pour transporter du pétrole, selon le groupe Dakota Access. Mais le pipeline devait également passer à travers des sites sacrés des Sioux, s’étendant en dessous de la rivière Missouri en amont de la réserve et de son point de réapprovisionnement en eau. Tout sauf la traversée de la rivière est actuellement terminé dans le Dakota du Nord, selon le groupe Dakota Access.

Le projet était resté dans l’incertitude, depuis que l’administration du président Obama l’avait suspendu temporairement en septembre, ainsi qu’au mois de novembre. Barack Obama a dit au média en ligne Now this news: «En ce moment, le corps de l’armée examine s’il y a des moyens de rediriger le pipeline». C’est ce qui s’est bel et bien produit.

Le mouvement de prière a débuté le 1er avril 2016 sur un parcours de près de 50 kilomètres depuis le site funéraire de Sitting Bull à Fort Yates jusqu’au campement de Sacred Stone. Des prières collectives matin et soir et lors des repas ont eu lieu dans les campements ainsi que des veillées accompagnées de chants. De la sauge, du cèdre et du tabac ont été brûlés pendant ces temps de recueillement. Et les Sioux ont invité tout le monde à les rejoindre. «Notre croyance est qu’il y a un seul créateur et il a enseigné à toutes les nations du monde une façon de prier, chacun a la sienne», a relevé Dana Yellow Fat.

«La façon de prier n’a pas d’importance»

Un jeudi matin pluvieux, à la mi-septembre, Morgan Maclver se promenait en priant avec une demi-douzaine de femmes autour d’un feu dans le camp d’Oceti Sakowin, avec de la boue jusqu’aux genoux. Morgan Maclver, qui n’est pas un Amérindien, est arrivé trois semaines plus tôt après avoir entendu parler du rassemblement sur Facebook. Et tandis qu’elle ne trouve sa spiritualité «qu’on fond d’elle-même», elle a dit avoir ressenti la puissance de la prière dans le camp. «Peu importe la façon dont vous priez, ou qui vous priez, tout cet amour dans votre cœur est le même. Et le pouvoir de la prière est la chose la plus puissante», a-t-elle ajouté.

Le 3 novembre dernier, plus de 500 membres du clergé ont rejoint les prieurs, chantant des hymnes en marchant vers un pont qui a été le lieu d’affrontements entre les manifestants - qui préféraient être appelés «protecteurs de l’eau» - et la police.

Pour le révérend David Wilson, - le surintendant des Choctas (les Nord-Amérindiens) de la conférence missionnaire indienne des méthodistes unis d’Oklahoma, qui avait visité les camps plus tôt -, les Ecritures ne sont pas seulement remplies d’ordres pour «agir avec justesse», mais aussi d’imageries en lien avec l’eau: Moïse a frappé un rocher pour apporter de l’eau à son peuple; les paroles de Jésus à propos des «fleuves d’eau vive» ainsi que les eaux du baptême. «Je pense à ces images. Nous ne pouvons pas vivre sans eau et pour les chrétiens, l’image de l’eau par rapport avec Jésus est très importante. Elle fait partie de notre hymnodie, de la liturgie, des Ecritures». Une délégation de l’Association des humanistes américains a également visité le camp au mois de novembre.

Une profanation des lieux

Les jours précédents l’arrêt de la construction, début septembre, les équipes de Dakota Access avaient enlevé la couche arable sur plus de trois kilomètres, ce que plusieurs campeurs ont comparé à la profanation et à la destruction d’une église. Pendant quatre jours, jusqu’à ce que les guérisseurs fassent une cérémonie et la déclarent terminée, des centaines de manifestants ont marché en priant d’Oceti Sakowin jusqu’au site où avaient lieu les excavations. Ils ont chanté, prié et porté des drapeaux des nations qu’ils représentaient.

Les tensions se sont intensifiées au cours des dernières semaines, notamment le dimanche 20 novembre quand le département du shérif de Morton County a dirigé des tuyaux d’incendie, des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc sur un groupe de 400 manifestants qui tentaient de supprimer un blocus de police qui coupait le camp d’un accès à l’autoroute alors qu’il faisait très froid.