Plus de 80 musulmans ont disparu le long de la frontière du Kenya

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Plus de 80 musulmans ont disparu le long de la frontière du Kenya

Frederic Nzwili
22 décembre 2016
Des religieux musulmans ont disparu dans des circonstances étranges, au Kenya
Leurs familles demandent des explications.

Photo: Des responsables musulmans informent des disparitions © RNS/Frederic Nzwili

, RNS/Protestinter, Nairobi, Kenya

Alors que des cheiks, des imams et des prédicateurs de la région côtière kényane disparaissent dans des tueries et des enlèvements, leurs épouses réclament des réponses. Les ecclésiastiques, dont certains sont âgés de plus de 50 ans, ont disparu ou sont morts après que les services de sécurité les ont suspectés de terrorisme.

«Le point commun entre toutes les victimes est qu’elles sont musulmanes et suspectées de terrorisme par les autorités», a déclaré Hussein Khalid, le directeur de Haki Africa, une organisation de défense des droits humains qui offre une aide juridique aux familles des victimes. Selon les militants, les crimes présumés vont de la radicalisation des jeunes à la facilitation des attaques et du recrutement pour al-Shabab, la filiale d'Al-Qaida en Somalie. Le Kenya a déployé des troupes en Somalie, en 2011, pour combattre le groupe extrémiste al-Shabab, mais a depuis subi plusieurs attaques terroristes.

Il y a trois ans, le mari de Saada Juma Seleman, Hemed Salim Ahmad, a disparu lorsque la police a pris d'assaut la mosquée Masjid Musa après des accusations selon lesquelles elle hébergeait de futures terroristes. Il n’est jamais réapparu. Actuellement, Saada Juma Seleman qui est mère de trois enfants ne sait que dire à son fils de 9 ans qui veut voir son père. «Je lui ai donné toutes sortes d'explications, mais maintenant je ne sais plus quoi lui dire. C'est douloureux et traumatisant». Depuis 2014, elle s'est lancée dans une recherche frustrante de justice.

Des disparitions depuis 2012

Haki Afrique a documenté 81 cas de ce type entre 2012 et 2016, dans un rapport intitulé «Que dire aux familles?». Ce document, publié début décembre, indique que les massacres ont augmenté après que les troupes kenyennes sont entrées en Somalie en 2011 à la poursuite d'al-Shabab. Les disparitions ont atteint leur maximum après la tuerie de Westgate Mall en septembre 2013, où des assaillants ont tué 67 chrétiens après les avoir séparés des musulmans.

Un porte-parole de la police, George Kinoti, a publié une déclaration en réponse au rapport dans laquelle il précise: «Le Service national de police rejette le fait que les allégations ont été basées sur des distorsions infondées des faits réels. Nous rejetons également les accusations au sujet des appartenances religieuses, car nous nous concentrons uniquement sur les criminels indépendamment de leur affiliation religieuse».

Les responsables chrétiens ont déclaré que bien qu’ils encouragent le gouvernement dans l’éradication du terrorisme, ils ne soutiennent pas les disparitions et les meurtres. «Nous exhortons le gouvernement à enquêter, puisque ces meurtres provoquent une crainte inutile au sein des familles», a souligné Julius Kalu, l'évêque anglican de Mombasa. «Nous voulons vivre en paix. Le gouvernement devrait réagir». Le révérend Peter Kariuki, un prêtre catholique, a ajouté que l'absence de résolution pourrait avoir des conséquences imprévues. «Les musulmans pourraient avoir l’impression que leur religion est prise pour cible et se venger contre les chrétiens».