La gauche religieuse entre en résistance contre Donald Trump
De nombreux Américains s’opposent à Donald Trump au nom de leur foi. Une gauche religieuse qui s’est fait remarquer au moment de l’investiture présidentielle.
Photo: Des Américains de toutes origines et confessions ont protesté contre Donald Trump. ©RNS/Jerome Socolovski
Par Lauren Markoe, RNS/Protestinter
Soutien à l’avortement, aux immigrants, au mouvement «Black Lives Matter» («Les vies des Noirs comptent»), à la science et… aversion envers un certain Donald Trump, voilà ce qui a poussé des centaines de milliers de personnes à participer à la Marche des femmes à Washington D.C. et ailleurs au jour de l’inauguration présidentielle. Un mouvement auquel se sont joints de nombreux chrétiens, juifs, musulmans ou bouddhistes pratiquants, unis par le rejet des religieux conservateurs courtisés par le nouveau président américain qui se présentent désormais comme la seule voix religieuse de l’Amérique.
Cette gauche religieuse a longtemps laissé le champ libre en politique à une droite désormais au sommet du pouvoir grâce à Donald Trump. Mais le fait d’avoir un ennemi clairement identifié à la Maison-Blanche pourrait pousser cette frange électorale à mieux s’organiser au cours des prochaines années.
Un nouveau souffle pour les droits civiques?Selon des experts du lien entre religion et politique aux Etats-Unis, la question des droits civiques pourrait même connaître un nouveau souffle grâce à leur mobilisation. «L’église est impliquée. Participer au processus politique a toujours fait partie de la tradition afro-américaine, celle dont sont issus le Dr Martin Luther King et tant d’autres», souligne Kathryn Harris, une habitante de Washington D.C.
L’immense affluence lors de la Marche des femmes – un demi-million de personnes y auraient participé alors qu’ils étaient bien moins nombreux à l’inauguration présidentielle – et le pic du nombre de communautés religieuses prêtes à accueillir les immigrants que Donald Trump veut déporter par millions pourraient indiquer que cette gauche religieuse gagne du terrain.
A Washington D.C., cette frange électorale a en tout cas fait entendre sa voix, répondant «Jésus ne connaît pas la haine;» aux petits groupes de religieux conservateurs qui vouaient les homosexuels et leurs «partisans» à l’enfer et comparaient l’avortement au meurtre.
Des vacances qui coûtent cher«J’ai l’impression d’avoir raccroché, de m’être dit: le gars que j’ai choisi est à la Maison-Blanche, je peux prendre des vacances – et c’est faux», affirme, dans la foule des manifestants présents à Washington D.C., Kathy Fitzsimmons, membre de la First Baptist Church à Greenville (SC). Elle s’en veut de n’avoir pas été plus active dans la défense des droits civiques lors de la présidence d’Obama et comme beaucoup d’autres se promet d’être plus engagée à l’avenir. Dans ses mains, une pancarte sur laquelle on peut lire: «Mon fils gay est un cadeau de Dieu». Cette référence religieuse était nécessaire, dit-elle. «Je veux être la voix de ceux qui ont la foi».
Nombre de ces religieux progressistes brandissent l’image d’une femme musulmane dans un voile aux motifs du drapeau américain, une œuvre de l’artiste Shepard Fairy à l’origine en 2008 du poster de Barack Obama appelé «Hope» («Espoir»). Houmera, une Américaine musulmane, évoque sa foi pour expliquer sa présence à la manifestation. «L’idée que les droits de la femme sont des droits fondamentaux est pleinement ancrée dans l’islam donc oui, nous sommes là».
«Bien plus» que les droits des femmesQuant à Andy Miller, c’est le judaïsme qui l’a poussé à venir manifester. «Nous sommes là parce que nous devons être là. Tout dans nos textes religieux nous demande de nous battre pour la justice, pour les droits de l’homme, pour l’égalité», affirme cet ancien président de la Chizuk Amuno Congregation, une synagogue réformée à Baltimore.
«Bien entendu, c’est la marche des femmes, mais il n’est pas question aujourd’hui que de droits des femmes. Il s’agit des droits des personnes de couleur, de la protection des populations à risque. Il s’agit de la protection des droits garantis par le Premier amendement. Il s’agit de tout ce qui nous est cher», conclut-il.