L’Église protestante de Genève assure sa relève
La chapelle du Centre paroissial de Malagnou, à Genève, était remplie, non seulement de délégués, mais aussi de proches, pour assister aux présentations des futurs ministres consacrés. Jeudi 18 janvier, lors d’une session extraordinaire du Consistoire, la diacre Annick Monnot et les pasteurs Elisabeth Schenker, Nathalie Schopfer, Gabriel Amisi et Nicolas Luthi de l’Église protestante de Genève (EPG) ont demandé la consécration. À l’issue des auditions, de discussions avec l’assemblée et de huis clos, les cinq candidats ont été applaudis et seront officiellement consacrés le dimanche 15 avril, à la Cathédrale de Genève.
«Pour moi, la consécration n’est pas un aboutissement, mais une étape sur un chemin en construction», lâche Nathalie Schopfer. Aumônière en hôpital et pasteure dans la région Plateau-Champagne, la trentenaire s’est présentée à travers une série d’ouvrages qui ont marqué sa vie ou illustrent son quotidien: Hans Jonas, Jürgen Moltmann, Simone Veil, mais aussi des livres sur la course à pied et l’écospiritualité. «Adolescente, j’ai été bouleversée par la visite des camps à Auschwitz. Je me suis beaucoup interrogée sur l’amour de Dieu face au mal», explique la jeune femme. «Être pasteure pour moi, c’est tous les jours, c’est ce que je suis». Quant à sa vision de l’EPG dans dix ans: «On disait déjà que l’Église était en crise il y a dix ans, également il y a quarante ans. J’espère que ce temps de crise sera prolifique et permettra de rejoindre nos contemporains et les enjeux de la société actuelle».
Dieu au centre
«Le travail des ministres devient de plus en plus pluriel, pas seulement au niveau des activités. Dans dix ans, j’imagine une Église moins centrée sur les pasteurs et tant mieux! Cela laissera plus de place pour mettre Dieu au centre», entrevoit Nicolas Lüthi, pasteur à la Servette, à l’origine des «cultes autrement». Pour se présenter, le trentenaire a laissé parler sa créativité en réalisant un sketch, jouant lui-même le rôle du pasteur-jardinier.
De son côté, Annick Monnot est arrivée devant l’assemblée avec un seuil à la main. «Le ministère de diacre est souvent décrit comme sur le seuil, en voici concrètement un», sourit la cinquantenaire en le posant devant ses pieds. «J’ai envie d’être dans une posture de passeur entre deux espaces. Ma découverte intérieure de l’immense valeur d’une relation avec Dieu me donne envie d’aller à la rencontre des autres. Le passage sur ce seuil est une porte ouverte», explique cette diacre animatrice jeunesse qui quittera l’EPG en juin prochain pour rejoindre les Églises de Berne-Jura-Soleure. Et l'EPG dans 10 ans? «On peut imaginer statistiquement qu'elle arrive à un point où elle touchera le fonds. Et cela pourrait peut-être être salutaire. La jubilation d'être encore en vie lui permettrait de renaître de façon plus simple».
Un appel dès l’enfance
«À douze ans, j’ai dit à mes parents que je souhaitais devenir prête. Pour moi, le curé de mon village représentait la personne la plus proche des démunis et des marginalisés. Ce désir de servir le Christ ne m’a jamais quitté», raconte Gabriel Amisi, né dans les années 1970 à Kinshasa. «Je me sens appelé à vivre ma vocation dans une perspective universelle et répondre aux besoins», ajoute ce pasteur de la paroisse de Chêne, responsable du ministère «Témoigner ensemble à Genève», un mouvement constitué avec les Églises issues de la migration.
Pour Élisabeth Schenker, la rencontre d’une patiente en fin de vie alors qu’elle travaillait comme ergothérapeute l’a profondément marquée l’amenant à réorienter sa carrière professionnelle. «J’ai eu envie de retourner à l’hôpital, mais en tant qu’aumônière, car personne ne devrait mourir seul». Objectif atteint pour cette cinquantenaire, pasteure dans la paroisse de Carouge et aumônière en hôpital qui souhaite que «l’EPG, en tant qu’institution, gagne encore en profondeur théologique d’ici dix ans». «L’EPG aura toujours la même mission qui consiste à annoncer l’évangile. Elle va se réorganiser pour y parvenir», souligne Gabriel Amisi.