Une Eglise mennonite neuchâteloise s’oppose à la reconnaissance étatique
Photo: La château de Neuchâtel CC (by) Martouf
«Les prérogatives octroyées aux communautés reconnues ne suffisent pas à expliquer toute l’énergie déployée par les milieux évangéliques pour obtenir cette reconnaissance de la part des autorités», écrit Thomas Gyger, pasteur mennonite dans une prise de position publiée le 16 août et présentée par le site lafree.ch. La pastorale de l’Eglise mennonite Les Bulles, à La-Chaux-de-Fonds, signataire de ce texte met en avant quatre principaux arguments défavorables à la reconnaissance des communautés évangéliques par le canton de Neuchâtel.
Premièrement, elle craint au vu des persécutions des communautés mennonites au cours de l’histoire de se retrouver sous l’emprise de l’Etat. De plus, elle souhaite préserver son rôle prophétique, apportant son propre témoignage sur le monde. Une autre raison concerne le refus de l’équivalence de la foi chrétienne avec les autres religions. Et finalement, partant du constat que les Eglises reconnues déclinent alors que les Eglises évangéliques ont plutôt tendance à se développer, il lui semble relever «d’une vision anachronique» que de vouloir cette reconnaissance.
Pour l’instant, il n’existe pas encore dans le canton de Neuchâtel de loi permettant cette reconnaissance, mais un projet de loi a été présenté et le Grand conseil se prononcera probablement cet automne. La Fédération évangélique neuchâteloise (FEN), dont fait partie l’Eglise Les Bulles, a depuis plusieurs années émis le souhait d’être reconnue par le canton. «La reconnaissance faciliterait le travail des Eglises au sein de la société et améliorerait leurs images. Quant aux contraintes imposées par l’Etat, on les respecte déjà», explique Olivier Favre, président de la FEN. «Nous entendons le point de vue des mennonites, leurs arguments sont tout à fait respectables, mais pas au point de remettre en question notre demande de reconnaissance. Nous pouvons tout à fait admettre qu’une Eglise ne soit pas reconnue». Selon Olivier Favre, le canton compte environ 200 mennonites et 5000 évangéliques dont les deux tiers font partie de la FEN.
Anticiper par rapport à VaudDans sa prise de position, Thomas Gyger déplore également la situation dans le canton de Vaud où les Eglises évangéliques doivent accepter une déclaration liminaire d’engagement avant de pouvoir faire leur demande officielle. Plusieurs membres de la Fédération évangélique vaudoise (FEV) ont refusé de signer ce texte notamment à cause d’une clause de prohibition de la discrimination à partir de l’orientation sexuelle. «Certains de nos membres ont craint que cette déclaration entrave nos libertés. Mais pour moi, suite à une séance au début de l’été avec la Commission consultative en matière religieuse (CCMR), c’est une porte d’entrée qui permet justement de discuter de notre collaboration avec l’Etat. Nous avons prévu prochainement une rencontre pour en débattre tous ensemble», explique Olivier Cretegny, le président de la Fédération évangélique vaudoise (FEV).
«Nous avons plus de 50 communautés dans le canton de Vaud et nous participons aux liens sociaux et à la transmission de valeurs fondamentales. Cette reconnaissance nous donnera une place officielle dans les aumôneries des prisons et en milieu hospitalier. De plus, l’Etat nous consulterait pour tout ce qui concerne le religieux, ce qui n’est pas le cas actuellement. Nous n’apprécions pas d’être considérés encore souvent comme une secte; avec une reconnaissance officielle, cette position inconfortable changerait. Je trouve dommage que Thomas Gyger projette des problèmes qui n’ont pas encore été vérifiés. On appelle cela un procès d’intention», rappelle Olivier Cretegny.