Les autorités turques font pression pour supprimer le mouvement Gülen

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Les autorités turques font pression pour supprimer le mouvement Gülen

Fredrick Nzwili
6 septembre 2016
Des écoles africaines affiliées à l’imam Fethullah Gülen pourraient devoir fermer leurs portes
Plusieurs responsables africains craignent que ces institutions tombent aux mains des fondamentalistes islamiques.

Photo: Des militants turcs opposés à Fethullah Gülen © RNS/Reuters/Umit Bektas

(RNS/Protestinter)

Nairobi, Kenya – Alors que les autorités turques font pression pour fermer les écoles africaines affiliées à l’imam Fethullah Gülen – accusé d’avoir orchestré la tentative de coup d’Etat cet été en Turquie –, certaines personnes craignent que cette répression puisse profiter aux fondamentalistes islamiques. Le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui accuse Fethullah Gülen âgé de 75 ans de conduire un Etat turc parallèle depuis son camp en Pennsylvanie, a cherché à le neutraliser bien au-delà des frontières turques, y compris en Afrique où il y a des centaines d’écoles affiliées au mouvement Gülen.

Adballah Kheri, qui dirige la société de recherches et d’études islamiques au Kenya, craint que la fermeture des écoles affiliées au mouvement Gülen laisse une place vide que l’Etat islamique autoproclamé chercherait à combler. «La fermeture de ces institutions pourrait certainement profiter aux fondamentalistes», a-t-il souligné. L’engagement de Fethullah Gülen en Afrique et à travers le monde passe par le mouvement connu sous le nom de «Hizmet», qui veut dire «l’aide aux autres» en turc. Le mouvement se décrit comme un réseau apolitique, culturel, basé sur la foi et éducatif qui cultive le dialogue interreligieux. Il a créé des centaines d’écoles en Afrique et ailleurs au-delà du Moyen-Orient.

Au Kenya, le révérend Wilybard Lagho, le vicaire général du diocèse catholique de Mombasa, a dit qu’il allait regretter la disparition des écoles Gülen. «Dans ces écoles, l’islam est enseigné en parallèle avec d’autres valeurs universelles. Je pense que les jeunes musulmans souffriront de ces fermetures», a-t-il.

Le mouvement Gülen bafoue l’islam traditionnel

Mais certains en Afrique soutiennent la politique anti-Gülen de Recep Tayyip Erdogan. Cheikh Hamid Byamugenzi, le directeur adjoint de l’Université islamique en Ouganda, pense que le mouvement Gülen – qui a des liens avec une approche mystique et modérée de l’islam, le soufisme – bafoue l’islam traditionnel. «Les gouvernements devraient prendre en charge les écoles et renvoyer le poison Gülen», a-t-il dit. «Leur idéologie affaiblit les vrais enseignements de l’islam».

Il a ajouté que les écoles affiliées au mouvement Gülen «étaient également trop coûteuses pour répondre aux besoins de nombreux enfants africains». Recep Tayyip Erdogan a réussi à faire que certains gouvernements africains se plient à sa volonté de supprimer Fethullah Gülen dans le monde entier. En août, le Ministère soudanais des Affaires étrangères a annoncé la fermeture de deux écoles à la demande du gouvernement turc. Et en Somalie – où la Turquie est profondément impliquée dans des projets de construction –, le gouvernement a fermé deux écoles et un hôpital affiliés au mouvement Gülen. Mais Adballah Kheri a déclaré que d’éliminer l’influence de Fethullah Gülen en Afrique serait très difficile, puisque son enracinement sur le continent s’était accru dans les précédentes décennies.

Dans certains pays d’Afrique, les partisans de Fethullah Gülen résistent aux appels turcs de fermer les écoles. Par exemple, les responsables du Collège international turc au Nigéria, un groupe de 17 écoles, ont houspillé les autorités turques. Les collèges ne sont pas «une institution dirigée par le gouvernement turc, mais une institution privée financée par un groupe d’investisseurs turcs», a déclaré Orhan Kertim, le directeur général des écoles, dans un communiqué. Il a qualifié la demande de l’ambassade de Turquie qui stipule de fermer les écoles «de sans fondement et de mauvais goût».