Place au sécularisme! Un rapport demande le retrait du christianisme dans la vie officielle britannique

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Place au sécularisme! Un rapport demande le retrait du christianisme dans la vie officielle britannique

Trevor Grundy
15 décembre 2015
Près de 1500 après que saint Augustin de Cantorbéry a fondé la première Eglise chrétienne d’Angleterre en 597, les Britanniques apprennent dans des termes qui ne laissent aucun doute, qu’ils ne vivent plus dans un pays chrétien.

Photo: L’Eglise d’Angleterre est la seule confession représentée lors du couronnement d’Elisabeth II CC(by) Bibliothèque et Archives Canada, K-0000045

, Canterbury, RNS/Protestinter

La Commission sur les religions et croyances dans la vie publique britannique a fait grand bruit la semaine passée en publiant un rapport qui met en doute la morale et le système de valeurs publiques éprouvées par le temps de ce pays. Dans des termes qui étonnent ou fâchent, le document préconise que le Royaume-Uni retire les références chrétiennes lors des cérémonies majeures de l’Etat pour faire place à davantage de pluralisme. Des événements tels que le couronnement devraient être modifiés pour être plus inclusifs, selon ce rapport, alors que le nombre d’évêques présents à la chambre des lords devrait être réduit pour faire place aux représentants d’autres religions.

Les recommandations de la commission présidée par la baronne Elizabeth Butler-Sloss, ancienne juge à la Haute-Cours, mettent en lumière les changements majeurs survenus dans la société britannique, tels que le déclin du nombre de personnes se déclarant anglicanes, passant de 40% en 1983 à moins de 20% en 2013.

Bien que la commission compte parmi ses membres des responsables et chercheurs représentant les principales traditions religieuses, un porte-parole de l’Eglise d’Angleterre a fustigé les conclusions du rapport «dominé par la conviction démodée que les religions traditionnelles perdent de l’importance et que la non-appartenance à une religion est synonyme d’humanisme ou de sécularisme.» Ce qui est probablement une allusion à l’appel de la commission pour une nouvelle régulation en matière de religion et de croyance au Royaume-Uni qui «ferait place et donnerait un rôle pour tous, au sein de la société, quels que soient leur conviction ou leur absence de convictions.»

Des sources proches de la famille royale prétendent que le Prince Charles, 67 ans, serait franchement favorable à certaines des recommandations du rapport. L’héritier du trône a souvent dit que quand il serait roi, il souhaiterait être défenseurs «des fois», plutôt que de seulement «la foi.»

Parmi les principales recommandations:

  • A la place des proclamées, mais peu comprises «valeurs britanniques», la création d’un état laïc sur le style de la Grande Charte qui en 1215 régla les relations entre la monarchie et les barons.
  • La mise au rebut des assemblées religieuses pour les écoliers et la fin de la séparation des enfants selon leur foi dans les écoles à travers tout le pays.
  • La fin du règne des 26 évêques anglicans de sexe masculin à la Chambre des Lords (chambre haute du Parlement britannique) et le remplacement de certains d’entre eux par des imams, des rabbins et autres clercs non chrétiens.
  • La refonte complète de la cérémonie de couronnement du prochain monarque afin que les responsables religieux autres que chrétiens y jouent un rôle majeur.
  • Une profonde réflexion autour de la politique antiterroriste du gouvernement britannique afin que les positions radicales puissent s’exprimer dans les universités et autres institutions d’enseignement par des prédicateurs ou enseignants qui sont actuellement bannis, taxés d’extrémisme par les services de sécurités et les réseaux de renseignements.

Fruit d’un travail de deux ans, cette recherche a été menée par l’Institut Woolf, qui a été ouvert à l’Université de Cambridge en 1998. C’est le principal lieu de réflexion et de recherche sur les relations entre les communautés chrétiennes, juives en musulmanes.

Dans leur travail de récolte de données, les membres de la commission ont auditionné Justin Welby, l’archevêque de Canterbury, qui est le leader spirituel des 800 millions d’anglicans dans le monde; Ephraim Mirvis, le Grand Rabbin (orthodoxe et d’origine sud-africaine) du Commonwealth; ainsi que plusieurs responsables de la communauté musulmane britannique, estimée aujourd’hui à 2,8 millions de personnes, mais en progression rapide.

Même ainsi certains chrétiens sont furieux. Ils pensent que les humanistes et les sécularistes sont à l’origine de ce rapport controversé, qui a été qualifié de «sérieusement erroné» par l’Eglise d’Angleterre, l’Eglise nationale du pays établie au XVIe siècle. La reine Elisabeth II en est le gouverneur suprême et porte le titre de «défenseuse de la foi».

Lors de son couronnement en 1953, la Reine Elisabeth a promis «de respecter la Loi de Dieu et la vraie profession de l’Evangile, de maintenir la religion protestante réformée établie par la loi et de préserver le Règlement de l’Eglise d’Angleterre.» Il n’y a pas eu la moindre référence à une religion autre que le christianisme ou à une dénomination autre que l’Eglise d’Angleterre lors de ce couronnement. Mais c’était il y a plus de 60 ans, quand la plupart des Britanniques, qu’ils aillent ou non l’Eglise le dimanche, mettaient «C of E» (abréviation de l’Eglise d’Angleterre) quand on leur demandait leur affiliation religieuse dans un formulaire.

Depuis, l’Eglise d’Angleterre fait face à d’importantes divisions internes. Justin Welby est occupé à préparer la rencontre de Canterbury le mois prochain sur le thème «construire ou diviser», durant laquelle sera déterminé le futur à long terme de la Communion anglicane. Il va tenter de maintenir en communion un groupe de 37 primats (chefs d’Eglise) qui sont amèrement divisés sur la question de la sexualité humaine.

Des sources proches de l’Eglise d’Angleterre déclarent que cette rencontre tentera de réparer les dommages causés par un clergé déchiré sur la question explosive d’accorder des droits de chrétiens complets aux femmes et aux hommes homosexuels. Le chemin serait ainsi pavé pour la prochaine Conférence de Lambeth en 2018, la rencontre phare de l’héritage britannique chrétien anglican.