Cinq agriculteurs présentent les enjeux de leur métier

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Cinq agriculteurs présentent les enjeux de leur métier

Laurence Villoz
26 janvier 2015
Producteurs de lait, d’œufs ou céréaliers: l’association Eglise et Monde du travail donne la parole à cinq agriculteurs vaudois, le jeudi 29 janvier, à la salle de paroisse de l’église Saint-Laurent, à Lausanne. Cette soirée publique permettra de s’interroger sur les processus de production et les modes de consommation.

«Je me fais du souci pour les jeunes qui reprennent des exploitations», lâche Philippe Gruet, un agriculteur de 59 ans, qui participera à la conférence «Paysan aujourd’hui: une passion», le jeudi 29 janvier, à Lausanne. Sur le thème de «la précarité dans le monde paysan», cette rencontre organisée par l’association Eglise et monde du travail (EMDT) réunira cinq agriculteurs à la salle de paroisse de l’église Saint-Laurent. Ils aborderont les enjeux quotidiens de leur travail.

Dans la campagne yverdonnoise, Philippe Gruet s’occupe avec sa femme, son fils et un apprenti d’une exploitation qui compte 110 têtes de bétail. «Nous avons entre 50 et 55 vaches laitières qui produisent 400’000 kilos de lait par année». En janvier 2015, le prix du litre de lait a chuté de trois centimes. «Si ce nouveau tarif est maintenu pendant toute l’année, je vais perdre environ 1000 francs par mois», explique Philippe Gruet.

Pour le producteur de lait, les journées sont rythmées par la traite des vaches, à l’aube et en fin d’après-midi. «Entre-temps, nous nous occupons du fourrage, des veaux et du nettoyage des étables. A chaque saison ses obligations: en été, il y a les foins, la culture et les moissons. En hiver, nous entretenons les machines et coupons du bois, car nous avons un chauffage à bois», explique-t-il. «Je vais bientôt arriver à la retraite et je me pose beaucoup de questions sur l’avenir des agriculteurs», ajoute Philippe Gruet qui pointe deux principaux problèmes.

Sclérose de l’agriculture?

Pour cet habitant de Sermuz (VD), l’introduction des payements directs –des contributions de la Confédération qui servent à rétribuer les exploitants pour les prestations fournies– n’est pas une solution. «Les payements directs que je touche sont plus élevés que mon revenu. Que je travaille bien ou mal, je gagne le même salaire, ce n’est pas normal. Cette mesure démotive les paysans et sclérose l’agriculture», constate Philippe Gruet. Un autre point inquiète l’agriculteur: la remise des domaines. «La caisse de retraite des paysans qui terminent leur activité est constituée essentiellement par la somme obtenue lors de la vente de leur exploitation. Mais actuellement, les exploitations ne se vendent plus, ou largement en dessous de leur valeur», s’inquiète-t-il.

De son côté, Fabien Thubert, qui prendra également la parole lors de la conférence, se montre plus serein. «Nous diversifions nos activités et développons de nouveaux moyens pour nous rapprocher du consommateur», relève ce jeune homme de 35 ans qui pratique l’agriculture biologique. A Pomy (VD), il travaille avec sa femme, ses beaux-parents et trois apprentis. «Notre activité principale est la production laitière pour la fabrication de gruyère. Mais nous cultivons également des céréales et réalisons des farines et des pains». Fabien Thubert collabore avec d’autres agriculteurs pour approvisionner des paniers bio, livrés aux consommateurs. «L’agriculture contractuelle de proximité nous permet d’avoir un lien direct avec le consommateur», précise-t-il. «Je suis plutôt confiant par rapport à l’avenir, mais pour moi le principal problème est le gaspillage et la surproduction intensive».

«Soit le consommateur cherche les produits les meilleurs marchés, soit il est prêt à payer un peu plus et consommer des produits locaux. Trop de gens ne savent pas de quoi est faite la vie d’un paysan et l’agriculture subit une pression économique importante», souligne le pasteur retraité Jean-Pierre Thévenaz, président d’EMDT. Cette association défend les intérêts des travailleurs, informe la société sur les conditions de travail dans certains domaines et s’engage politiquement, notamment en prenant position lors de votations. Autonome et ouverte à tous, elle est reconnue par l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud et collabore également avec des partenaires catholiques.