Plus d'un millier de personnes à Lyon pour le premier synode de l’Eglise protestante unie de France

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Plus d'un millier de personnes à Lyon pour le premier synode de l’Eglise protestante unie de France

Julie Paik,
14 mai 2013
On attendait un millier de personnes. Le Grand Temple de Lyon et ses 1000 places n’auront finalement pas suffi à accueillir l’afflux des fidèles venus participer, samedi 11 mai, au service inaugural marquant solennellement la naissance de l’Eglise protestante unie de France, avec le sentiment d’assister à un moment historique.
(Photo: La façade du Grand Temple de Lyon illuminée de bleu ©Julie Paik)

Lyon

Un sentiment partagé par les différents intervenants qui ont pris la parole: «C’est un moment majeur dans l’histoire de l’œcuménisme en France», a déclaré Mgr Emmanuel, métropolite orthodoxe de France et président de la Conférence des Eglises Européennes. «C’est un moment exceptionnel que nous sommes en train de vivre», a renchéri le cardinal Philippe Barbarin, représentant la Conférence des évêques de France.

«Pour nous, catholiques, votre décision provoque à la fois envie et admiration. (...) L’événement de ce jour étonne et réveille tout le monde. (...) En novembre dernier, je l’ai évoqué devant le pape Benoît XVI, et il a exprimé sa surprise, en faisant allusion aux graves conflits qui avaient marqué le début de la Réforme».

Le discours très remarqué du cardinal a d’ailleurs semblé ouvrir une porte à la possibilité de l’hospitalité eucharistique que souhaitent bon nombre de chrétiens engagés dans le dialogue œcuménique.

Un fruit concret du dialogue œcuménique

Car c’est bien avant tout de dialogue œcuménique qu’il s’agit. L’union entre réformés et luthériens français est le fruit du processus de rapprochement entre différentes confessions chrétiennes entamé au début du siècle dernier, notamment sous l’égide du Conseil Œcuménique des Eglises. Sans ces discussions, qui ont abouti à des accords sur des points de divergence théologiques, elle n’aurait pas été possible.

Mais si elle est largement perçue comme un signe d’espoir, alors que le dialogue œcuménique donne parfois l’impression d’être entré dans une période de stagnation, elle n’est pas un aboutissement en soi. «L’union que nous célébrons aujourd’hui n’est qu’une étape dans une marche commune», a souligné la pasteure lyonnaise Anne Faisandier.

Une nouvelle Eglise pour un paysage religieux en mutation

Le pasteur Laurent Schlumberger, président du conseil national de la nouvelle Eglise, a rappelé une des mutations fondamentales à laquelle est confrontée le protestantisme français: «Depuis son apparition et depuis cinq siècles, être protestant en France, ce fut ne pas être catholique. Les protestants ont constitué une alternative ultra-minoritaire au culte dominant.»

Mais cette époque est révolue. Dans une France où les athées et agnostiques sont désormais majoritaires, toutes les confessions chrétiennes font désormais l’expérience de la minorité. «C’est notre grand défi, pour cette génération: intégrer ce renversement complet de ce que nous avons longtemps été, pour être fidèles aujourd’hui et demain à l’Evangile que nous avons reçu, à notre manière de le comprendre et de le partager», a exhorté le pasteur Schlumberger. «Il s’agit, pour notre protestantisme, de passer de la connivence au partage, de l’entre-soi à la rencontre, d’une Eglise qui se serre les coudes à une Eglise qui ouvre les bras.»

Toucher du doigt la réalité de l’Eglise

Durant l’après-midi, ce sont les mêmes idées exprimées différemment que l’on entend. Les participants (pasteurs, délégués synodaux ou simples paroissiens) se retrouvent autour des animations proposées dans le Village, des dizaines de tentes blanches posées sur le quai du Rhône.

A l’heure des rencontres, des échanges, des retrouvailles avec des amis perdus de vue, ils confient volontiers que leur présence à cette journée leur permet surtout une prise de conscience: prise de conscience du défi qui les attend, formulé par le pasteur Schlumberger; prise de conscience surtout que l’union est désormais bien réelle, et que la réalité de l’Eglise est beaucoup plus diverse que la vie des paroisses ne le laisse sentir.

Pour Eric, venu en voisin d’une paroisse réformée de Haute-Savoie, l’Eglise unie ne signifiait jusqu’alors pas grand-chose. «Chez nous, il n’y a presque que des réformés», explique-t-il. «Il n’y a donc pas cette visibilité des différentes confessions. Aujourd’hui, je peux vraiment toucher du doigt combien le protestantisme est multiple et vaste.»

«Jusqu’ici, je ne voyais pas bien ce que l’union allait changer», renchérit son épouse Béatrice. «Je me rends compte que tout est à construire; pour moi, le luthéranisme est encore un monde étranger à découvrir.»

«Les luthériens me sont devenus proches»

Françoise, elle, est déléguée synodale. «Je viens de l’Ouest de la France», explique-t-elle. «Or, dans l’Ouest, il n’y a pas de communautés luthériennes. Je trouve que cette union est très intéressante sur le principe, mais elle ne changera rien à la vie concrète de ma paroisse. Par contre, depuis que je suis déléguée au synode national, j’ai rencontré beaucoup de luthériens et j’ai pu découvrir leurs attentes, leurs difficultés, les différences qu’il y a encore entre nous.

Je me suis aussi rendu compte combien, dans l’Est, il y avait une vraie collaboration sur le terrain qui faisait que les gens rêvaient depuis longtemps de cette union.» Son regard sur les luthériens a changé: «J’ai en particulier rencontré une jeune pasteure luthérienne de Montbéliard qui est originaire du même petit village breton que ma famille. Ce genre de rencontre fait que les luthériens ne sont plus pour moi des gens de l’extérieur; ils me sont devenus proches.»

Etienne, pasteur réformé qui est également venu de l’Ouest, confie que ce premier synode représente d’abord pour lui l’aboutissement de nombreuses heures de travail. «Je suis bien content d’être là et de témoigner de la manière particulière qu’a le protestantisme de vivre sa foi, une manière qui intègre la diversité.» Et d’un point de vue plus personnel? Etienne sourit: «Je me sens boosté à tous points de vue! La communion vécue pendant ces jours de synode me relance en avant. Au bout de dix ans de ministère pastoral, j’ai l’impression de vivre un nouveau départ.»

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