La paroisse de St-François-St-Jacques dit oui à la vente de la maison des Charmettes

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La paroisse de St-François-St-Jacques dit oui à la vente de la maison des Charmettes

23 novembre 2012
Le foyer paroissial de St-François, « Les Charmettes », va passer en main de l'association des comités nationaux olympiques, l'ACNO. La décision de l'assemblée de paroisse est tombée jeudi 22 novembre. Par 30 voix contre 20 et 2 abstentions, elle dit oui à la vente de cette maison et de son jardin, nichés en plein coeur de Lausanne. L'Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) a renoncé à l'acheter.

Après plusieurs mois d'incertitude, les jeux sont faits. « Avec ces 5 millions de francs, prix plancher, nous pourrons éviter la cessation de paiements de la paroisse d'ici deux-trois ans», a expliqué André Hoffer, le président du Conseil de paroisse.

Les chiffres sont accablants. Depuis dix ans, la paroisse voit ses recettes diminuer. Pour les trois derniers exercices, tandis que les dépenses oscillent entre 140 000 et 160 000 francs, les rentrées tombent à 78 000 francs pour le budget 2013. En cause, le vieillissement des paroissiens et la baisse des dons. Quelque 40 000 francs de dons sont inscrits au budget 2013 alors qu'ils atteignaient le double en 2008. Le Conseil a encore invoqué la difficulté de connaître les nouveaux arrivants protestants dans la paroisse, car ils ne s'annoncent plus au contrôle des habitants.

Les trois fondations d'une paroisse riche

Dans ce contexte, la vente de la maison des Charmettes semblait être la solution. Or cette vision était contestée par des opposants. « Nous n'avons pas une vision d'ensemble de la situation financière de la paroisse, car vous ne nous ne présentez pas les chiffres des trois fondations », a argumenté un des paroissiens, parmi la soixantaine de têtes grisonnantes qui avait fait le déplacement. Plus largement, cette paroisse est considérée comme une paroisse relativement riche en raison de sa fortune.

Pour la poignée de paroissiens qui auraient voulu conserver la maison des Charmettes, la soirée a donc été amère. « Je ne vais pas réussir à dormir », a expliqué Florence Junod, la paroissienne qui a réussi à bloquer momentanément la vente.

Sans hypothèques et rapportant quelques dizaines de milliers de francs de location, les opposants estiment que ce bien aurait pu être mieux rentabilisé plutôt que d'être vendu. Ils auraient souhaité obtenir un délai de six mois pour présenter un projet de rentabilisation. Benjamin Righetti, le jeune titulaire des orgues de St-François, n'a pas pu prendre la parole, car il n'est formellement pas membre de la paroisse. Or M. Righetti a fait une demande au mois de mai pour entrer dans la paroisse de St-François. Il est « scandalisé par sa mise à l'écart comme par cette vente ».

Pas de priorités posées

La perspective de voir la maison des Charmettes cédée à un organisme sportif sans lien avec l'EERV, sans but caritatif et exempté d'impôt a créé un certain émoi. « Cette maison pourrait ensuite être déclassée et vendue à un prix bien plus élevé que le prix actuellement articulé », craignaient plusieurs paroissiens. La note 3 attribuée au classement du patrimoine ne protège pas cette maison de maître contre les travaux ou la démolition.

L'Eglise dans son ensemble manque d'argent et va surtout en manquer à l'avenir.

Mme Junod et son groupe ont émis d'autres critiques. Pourquoi vendre alors que la paroisse n'a pas véritablement de projets à faire valoir? La vente des « bijoux de famille » intervient sans que le fonctionnement de la paroisse n'ait été analysé et des priorités posées.

Mais l'indignation a atteint son maximum sur un point précis. « L'Eglise dans son ensemble manque d'argent et va surtout en manquer à l'avenir », s'est insurgé un intervenant. « Et dans vingt ans, l'Eglise ne sera peut-être plus liée à l'Etat. Que restera-t-il des ces 5 millions de francs? », s'est interrogé un autre membre de la paroisse.

Pas assez rentable pour l'EERV

L'Eglise cantonale, l'EERV, n'a a priori pas son mot à dire sur cette vente, car les paroisses sont tout à fait autonomes sur ce point. Mais elle a été contactée par Florence Junod. « Nous avons d'abord suspendu la vente parce que la procédure n'a pas été respectée lors du premier vote de l'assemblée », a expliqué Esther Gaillard, présidente du Conseil synodal de l'EERV en charge du dossier immobilier et présente jeudi soir. « Et nous avons ensuite étudié le dossier avec soin. Nous avons même songé à l'acheter, mais nous y avons renoncé », a poursuivi Mme Gaillard.

L'EERV, qui possède aussi un patrimoine immobilier, vient d'investir 2 millions pour la rénovation de la maison de l'Arzillier à Lausanne. « Aux Charmettes, l'investissement pour la rénovation serait trop important, au minimum 1 million de francs et jusqu'à 3 pour la mise en location. De plus, les perspectives de rendement étaient trop faibles. »

Mise sous tutelle?

Pour la paroisse St-François-St-Jacques, le débat n'est pas clos. Il s'agira ensuite de s'entendre sur l'affectation des 5 millions de francs. Ce qui promet encore quelques belles empoignades. « J'aimerais que cette paroisse soit mise sous tutelle avant qu'elle ne dilapide le produit de la vente », a encore déclaré Mme Junod, qui va sortir de la paroisse.

Du côté de la Ville de Lausanne et du mouvement olympique, on voit d'un bon oeil une meilleure implantation de l'ACNO dans la capitale vaudoise. « Refuser à l'ACNO une meilleure implantation à Lausanne serait un très mauvais signal », expliquait l'ancien directeur du Comité international olympique (CIO), François Carrard, dans les colonnes du quotidien vaudois 24 heures début octobre.

L'ACNO, l'association des comités nationaux olympiques a déjà son secrétariat au Grand-Chêne. Son siège principal se situe à Paris. Cet organisme regroupe les 203 comités nationaux olympiques. Le président de l'ACNO est le cheik koweïtien Ahmad Al-Fahad Al-Sabah.


Tania Buri

Au coeur de Lausanne

La maison des Charmettes se situe entre l'avenue de Montbenon et Mornex. Elle a été vendue en 1978 à la paroisse de St-François par Marie Dufour, la célèbre organiste lausannoise, morte en 2007. Le Lyceum Club de Lausanne et l'Association suisse de la maladie de Parkinson y ont leur bureau.

Cet article a été publié dans :
le quotidien vaudois 24 heures du samedi 24 novembre 2012.