Bourses en faculté de théologie: à quand l’harmonisation?

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Bourses en faculté de théologie: à quand l’harmonisation?

Laurence Villoz
20 novembre 2012
A Genève, la majorité des étudiants de nationalité française de la faculté de théologie bénéficient de la Bourse française. Alors qu’il n’y a qu’une bourse annuelle pour un étudiant suisse. Venant essentiellement de fonds privés, les bourses d’études disponibles dans les facultés de théologie de Suisse romande sont extrêmement hétéroclites. Faut-il choisir sa faculté en fonction de sa nationalité?


« On manque de bourses pour les étudiants suisses », assure François Dermange, professeur ordinaire d’éthique à la Faculté de théologie de l’Université de Genève (Unige). En effet, une seule bourse par année est destinée à un étudiant suisse. Deux autres bourses sont octroyées pour des étudiants de l’Europe de l’Est ou d’Afrique. Et trente Bourses françaises sont attribuées à des étudiants de cette nationalité qui se destinent au ministère pastoral, idéalement en France.

Le montant de cette Bourse française est d’environ 1500 francs suisses par mois pour un étudiant qui suit les cours en présence. Les taxes universitaires et l’assurance maladie de l’étudiant sont aussi prises en charge. Pour les étudiants à distance*, la somme est moins élevée. De plus, la bourse est indépendante de la fortune des parents. Si cette Bourse française paraît surprenante, son origine l’est encore plus. Il faut remonter au 18ème siècle (lire encadré ci-dessous).

« Cette situation est très paradoxale », constate François Dermange qui aimerait pouvoir harmoniser les bourses au niveau romand. Parallèlement, le nombre de demandes de bourses ne cesse d’augmenter car le profil des étudiants se modifie. « Les étudiants sont plus âgés qu’auparavant. Certains étudient la théologie comme deuxième formation ce qui implique qu’ils ont des charges plus élevées qu’un jeune », explique Andreas Dettwiler, doyen de la Faculté de théologie de l’Unige. De son côté, la Faculté de théologie de l’Université de Lausanne (Unil) ne rencontre pas les mêmes problèmes.

Unil: moins d’étudiants mais toujours le même nombre de bourses

« La faculté propose des conditions d’études privilégiées », sourit Frédéric Amsler, professeur ordinaire d’histoire du christianisme à la Faculté de théologie et des sciences des religions de l’Unil. Bien que le nombre d’étudiants en faculté de théologie ait baissé, le nombre de bourses n’a pas changé. La faculté de Lausanne bénéficie de plusieurs bourses d’études, non seulement pour partir étudier à l’étranger mais aussi pour aider des étudiants suisses de ressources modestes (ci-dessous les liens vers les différentes bourses).

« Par contre, on va peut-être manquer de bourses pour les étudiants en sciences des religions », relève le professeur. De plus en plus d’étudiants étudient les sciences des religions au détriment de la théologie. Mais les bourses qui viennent majoritairement de l’Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) sont destinées aux étudiants en théologie uniquement. Venant en grande partie des collectes dans les églises, ces bourses visent à assurer la relève du corps pastoral.

En plus des bourses provenant de fonds privés octroyées aux facultés les plus chanceuses, les cantons et la Confédération soutiennent les étudiants en situation précaire. Là encore, d’énormes disparités apparaissent entre les cantons (lire encadré ci-dessous).


* La Faculté de théologie de l’Unige permet aux étudiants d’étudier à distance (lire Théologie à Genève: plus d’étudiants à distance qu’assis dans les amphis )


Anne d’Angleterre finance les études des théologiens français
Au 18ème siècle, la reine Anne d’Angleterre, de confession anglicane, a laissé des fonds pour permettre aux Français protestants d’étudier la théologie. A cette époque en France, Louis XIV persécutait les protestants. Il n’y avait plus de faculté de théologie protestante. Les Français venaient alors étudier au séminaire français de Lausanne sous des pseudonymes. Puis sous l’Empire, Napoléon a rapatrié les étudiants à Genève, qui était devenu un département français. Ainsi, depuis près de 300 ans, la Bourse française continue d’exister grâce aux fonds même laissés par le reine Anne d’Angleterre.




Un petit pas vers l’harmonisation des bourses en Suisse
En Suisse, les étudiants en situation précaire peuvent faire une demande de bourses auprès des cantons et de la Confédération. Mais ce système n’est pas harmonisé et de fortes différences se remarquent entre les montants des bourses d’un canton à l’autre. Par exemple, dans le canton de Schwyz, une bourse d’étude semestrielle pour étudier à l’université s’élève à 2792 francs suisses. Dans le canton de Zurich, une même bourse est de 6019 francs suisses, révèle l’Office fédéral de la statistique dans son rapport pour l’année 2011.

En 2011, les cantons ont octroyé 306 millions de francs sous forme de bourses d’études tous degrés confondus. La Confédération a participé avec 25 millions en versant environ 3,15 francs suisses par habitant et par canton. Il y a neuf mois l’Union des étudiants suisses (UNES) a déposé une initiative populaire qui demande à la Confédération de gérer l’ensemble des bourses concernant les formations tertiaires. Le 31 octobre dernier, le conseil fédéral a ouvert la consultation à propos d’une révision de la loi sur les bourses d’études.

La Confédération ne soutiendra pas l’initiative de l’UNES qui lui coûterait quelques 500 millions par an, mais appuiera les efforts d’harmonisation des cantons. Elle se dit prête à verser une aide financière aux cantons en fonction de leurs efforts en matière de bourses et non plus par rapport aux nombres d’habitants par canton. L’UNES « se réjouit que le Conseil fédéral se soit exprimé pour une harmonisation », mais déplore qu’il ne veuille pas s’investir plus.



Quelques adresses
Les bourses pour les étudiants de théologie à l’Unil: