Gay Pride à Genève : la célébration œcuménique fait débat

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Gay Pride à Genève : la célébration œcuménique fait débat

Anne Buloz
4 juillet 2011
La désormais traditionnelle célébration œcuménique organisée dans le cadre de la Gay Pride romande ne fait pas l’unanimité. Ses détracteurs, au sein même des participants à la marche des fiertés lesbienne et gay, reprochent aux différentes Eglises leurs prises de position homophobes.




Un petit groupe a pris part à la cérémonie religieuse le samedi 2 juillet, à l’Espace Fusterie de Genève. « Cette célébration va de soi pour certains, qui croient que Dieu est au cœur de l’humain, du côté des pauvres, des petits et de ceux qui sont mis à l’écart. Les homosexuels ne font plus tout à fait faire partie des parias aujourd’hui », se réjouit le théologien Jean-Paul Guisan.

Le fondateur du groupe Chrétiens et Homosexuels (C+H) au sein de l’association homosexuelle genevoise Dialogai comprend néanmoins les personnes hostiles à cette cérémonie : « Pour certains gays, l’Eglise est l’ennemi numéro 1. Quelques militants au sein de Dialogai ne comprennent donc pas la raison de cette célébration et y sont férocement opposés. Les purs et durs disent que nous pactisons avec l’ennemi ».

Le pêcheur accepté, pas le pêché

C’est notamment le cas de Barbara : « Je pense que les trois grandes religions monothéistes sont discriminantes envers les homosexuels. Nous sommes régulièrement confrontés à des propos très homophobes de la part des Eglises, notamment de l’Eglise catholique. Des propos terribles ont été tenus, par exemple sur le fait que c’est l’homosexualité des prêtres qui mène à la pédophilie. Pour moi, cette célébration n’est donc pas très cohérente. C’est de la récupération. L’Eglise accepte le pêcheur mais pas le pêché. Je trouve ce discours inadmissible. Les Eglises doivent se moderniser ».

Etre chrétien et homosexuel ne va pas de soi pour beaucoup. Bertrand a été, durant plusieurs années, de ceux-là. Samedi, il a pris part à la célébration œcuménique à l'Espace Fusterie. « J’ai connu un passage de non-acceptation de mon homosexualité. J’ai voulu en guérir avec l’aide de Dieu. Puis, lorsque je l’ai acceptée, on me disait que ce n'est pas moi qui l'ai choisie mais Dieu qui m’a créé comme cela. Certains ne l’ont pas compris dans mon Eglise. Ils ne m’ont pas rejeté, mais il y a eu un froid », explique le trentenaire.

Manger des fruits de mer est aussi une abomination

Aujourd’hui, Bertrand assume sa foi chrétienne et son homosexualité : « Dans l’Ancien Testament, l’homosexualité est considérée comme une abomination. Mais il est aussi dit que manger des fruits de mer en est une. Tout le monde le fait pourtant. J’interprète la Bible à ma manière. C’est à chacun de chercher sa voie avec Dieu. Je retiens le psaume 139, qui dit que je suis une créature merveilleuse ! ».

Jean-Paul Guisan, qui a assuré la prédication de samedi, a lui aussi mis longtemps à accepter son homosexualité : « Je me suis alors posé la question de savoir si elle était compatible ou pas avec ma foi chrétienne. En créant le groupe C+H, je me suis rendu compte que bien d’autres personnes étaient dans la même situation que moi ». Une réalité encore très concrète puisque près de 80 personnes ont pris part aux réunions organisées depuis et que le groupe créé il y a peu à Lausanne suscite un réel intérêt.

"Jésus lutterait pour nos droits"

Daniel rejoint Jean-Paul Guisan lorsqu’il parle, dans sa prédication, de « se tourner avec Dieu, vers le Christ, vers le cœur du message de la Bible, vers le cœur de l’Evangile ». Le jeune Américain, en Suisse pour deux mois et demi, fait lui aussi la part des choses : « J’ai assisté à cette cérémonie parce que je pense que le message essentiel est que le Christ est amour et justice. Je crois que Jésus descendrait dans la rue, avec les gens qui défilent, pour lutter afin que tout le monde aie les mêmes droits et que la justice soit la même pour tous ».