« Petit lexique des guerres de religion » d’Odon Vallet :Intolérance et charias en tous genres

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« Petit lexique des guerres de religion » d’Odon Vallet :Intolérance et charias en tous genres

9 janvier 2004
Communier, excommunier : telles sont les deux fonctions antagonistes du lien religieux
Historien des religions, Odon Vallet a le sens des raccourcis qui font grincer des dents. Dans son « Petit lexique des guerres de religion » qui vient de sortir de presse, il s’en donne à cœur joie. Celui qui appelle Calvin « l’ayatollah du Lac Léman » et qui fustige tous les fanatismes, rappelle que la religion a engendré la violence et la non-violence comme elle a créé le diable et le bon Dieu. Veut-on chasser Dieu des conflits, qu’il revient au galop ! Eradiquer les religions ne supprime pas pour autant les guerres saintes. L’auteur rappelle que l’athéisme, qui a tué la vie éternelle au nom des lendemains qui chantent, a aussi ses martyrs et qu’il a fait des hécatombes de victimes. Il n’y a pas de monopole du fanatisme ni de guerre purement religieuse. L’interaction des données théologiques, économiques, démographiques et stratégiques est fort complexe.

Odon Vallet passe en revue 41 conflits qu’il classe par ordre alphabétique classés par ordre alphabétique, autant de haltes sur le sentier de la guerre. On s’aperçoit en égrenant au hasard ces rubriques, que les persécutés peuvent devenir les persécuteurs, que la domination des peuples a souvent passé par la conquête forcée des âmes et que Constantin, le premier empereur chrétien, fut un personnage cruel et sans scrupules qui n’hésita pas à faire tuer sa femme et son fils avant de recevoir le baptême sur son lit de mort, d’un évêque hérétique !

Si les religions monothéistes qui prêchent une vérité unique et considèrent les autres croyances comme des erreurs, connaissent de graves dérives fanatiques, les polythéismes ne sont pas blancs comme neige et ont eux aussi provoqué des violences : les précolombiens se livraient à des sacrifices humains, les Romains ont persécuté les chrétiens, les intégristes hindous ont pourchassé musulmans et chrétiens, et même les moines bouddhistes au Sri Lanka ont encouragé l’intransigeance à coloration raciste, envers les Tamoul hindouistes.

Odon Vallet recense 41 conflits qu’il classe par ordre alphabétique et qui sont autant de haltes sur le sentier de la guerre. Edifiant : les persécutés peuvent devenir des persécuteurs, la domination des peuples passe souvent par la conquête forcée des âmes, les dissidents et les mécréants sont volontiers noyés, brûlés ou passés par les armes.

Le classement en rubriques courtes a forcé Odon Vallet à des raccourcis saisissants, révélateurs d’une vérité ainsi débarrassée de l’image idéale dont ses adeptes veulent souvent la parer. Il appelle un chat, un chat et c’est tant mieux ! Ce qu’ont souvent de la peine à faire les intégristes de tout poil, dont certains islamistes qui se disent progressistes mais s’obstinent à cacher ou à taire les textes du Coran qui posent problème par leur rare violence. Odon Vallet ne passe pas sous silence ce qu’il nomme « la charia chez les chrétiens », qu’il énumère sans complaisance ni ne ménage ses critiques à l’égard des baptistes fondamentalistes américains, racistes et populistes. Tout le monde en prend pour son rhume, même les adeptes des arts martiaux et du bouddhisme et c’est tant mieux ! Il vaut mieux ouvrir les yeux sur les ombres de l’humanité et reconnaître ses torts : cela permet de prendre ses distances et d’instaurer avec l’autre, qui pense et croit autrement, un véritable dialogue. Ce petit lexique aide à perdre quelques illusions et invite à une tolérance plus nécessaire que jamais à l’heure de la résurgence des guerres saintes.Odon Vallet, « Petit lexique des guerres de religion d’hier et d’aujourd’hui », éd. Albin Michel, janvier 2004.