Le secrétaire de Pain pour le Prochain dénonce le chantage à l'aide au développement:"Ne rien faire contre la pauvreté, c'est multiplier le nombre de requérants"

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Le secrétaire de Pain pour le Prochain dénonce le chantage à l'aide au développement:"Ne rien faire contre la pauvreté, c'est multiplier le nombre de requérants"

25 novembre 2003
« Couper le budget de la coopération au développement, c’est enfoncer les pays les plus pauvres encore plus dans la misère et multiplier ici le nombre des requérants d’asile ! » avertit Théo Buss
Le secrétaire romand de Pain pour le Prochain (PPP) met en garde contre les effets pervers de mesures de rétorsion envisagées pour punir les pays qui refusent de reprendre leurs ressortissants refoulés de Suisse. La proposition de la Commission des Institutions politiques (CIP) du Conseil National de pénaliser les pays qui refusent de reprendre leurs ressortissants dont l’asile a été refusé par la Suisse, est « un chantage inacceptable » s’indigne le secrétaire romand de Pain pour le Prochain à Lausanne. L’oeuvre d’entraide, présente dans 57 pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, mise tout sur la coopération au développement dans les pays du Sud pour y diminuer la pauvreté. « Les projets que nous soutenons sur le terrain avec l’Entraide Protestante (EPER) et 14 autres œuvres, doivent permettre à chacun de trouver un gagne-pain sur place plutôt que de voir dans l’exil la seule porte de salut. Couper de façon linéaire le budget de l’aide au développement, c’est enfoncer les pays du Sud dans une pauvreté toujours plus grande et augmenter à coup sûr le nombre de requérants d’asile », prévient Théo Buss qui dénonce l’effet pervers de telles mesures. Il rappelle que dans les pays africains les plus pauvres, 3 personnes sur 5 estiment que leur salut se trouve en Europe. « Poussés par la misère, les gens se jettent dans des embarcations de fortune qui font parfois naufrage, se lancent dans de périlleux voyages avec des passeurs sans scrupules et vont jusqu’à se cacher dans le train d’atterrissage des avions pour ameuter l’opinion occidentale sur la famine qui sévit chez eux.

Pour le secrétaire de PPP, l’aide au développement permet de donner aux communautés une formation et des outils pour qu’elles puissent prendre en main leur destin, de mettre sur pied des projets utiles à toute une communauté, à améliorer l’agriculture locale, mais aussi la santé.

Pour le secrétaire de PPP, cette aide sur le terrain ne suffit pas. Il faut également lutter contre le dumping des produits alimentaires d’Amérique du Nord et de l’Union européenne, largement subventionnés par l’Etat, qui détruit systématiquement l’agriculture des pays du Sud. Théo Buss cite l’exemple de paysans haïtiens qui ont renoncé à cultiver du riz, ruinés par la venue sur le marché des surplus de riz américain de la pire qualité, proposés dans un premier temps à un prix imbattable. Débarrassés de la concurrence locale, les exportateurs de riz américain ont ensuite remonté leurs prix. Le consommateur haïtien paie aujourd’hui le riz américain plus cher que ce que lui coûtait le kilo de riz indigène. Baisse spectaculaire des dons A cette menace de pénalisation des pays pauvres par la suppression de l’aide au développement, s’ajoute la baisse catastrophique des dons aux œuvres caritatives suisses, relevée par l’Office des statistiques en 2002. Le manque à gagner a été chiffré : ce sont 100 millions de francs suisses qui manquent dans les caisses de ceux qui travaillent à améliorer le sort des plus défavorisés ici et ailleurs. Un recul des dons individuels qui s’explique en partie par un repli sur soi après les 11 septembre 2001, l’augmentation du chômage et de la précarité de l’emploi. « On pense d’abord à soi, analyse Théo Buss, on réserve ses dons pour les gens de chez nous qui se trouvent dans la précarité ou pour les victimes de catastrophes qui frappent les esprits. On oublie que soutenir le développement durable dans les pays du Sud, c’est aider des populations à vivre décemment chez elles ». L’ONU demande depuis des années aux pays industrialisés de consacrer 0,7% de leur PNB à l’aide au développement. Notre pays, qui s’est engagé à accorder une aide au développement représentant 0,4 % de son PNB d’ici à 2010 remet chaque année en cause son engagement solidaire par des restrictions budgétaires.