L’hospitalité: une porte vers l’intégration

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L’hospitalité: une porte vers l’intégration

16 janvier 2003
Un cycle de conférences organisé par l’Université de Lausanne pose la question de l’exil et de l’intégration
Le flot des réfugiés qui demandent l’asile est un enjeu majeur pour la Suisse. La récente initiative lancée par l’UDC et les scores qu’elle a obtenus le prouvent. Le recours au renvoi des réfugiés est envisagé par une nombreuse partie de la population comme la seule solution. Claude Raffestin, professeur de géographie, a ouvert ce cycle en revalorisant l’hospitalité et sa capacité d’intégration.Ce géographe définit l’hospitalité dans son sens classique, comme un devoir à remplir face à l’étranger de passage pour spallier la faiblesse des structures d’accueil. Les rites de l’hospitalité, quant à eux, impliquent le franchissement d’un seuil et symbolisent la communication. Ils permettent la transition entre un monde sauvage et nomade qui est confronté à un autre monde culturel et sédentaire. Dans ce contexte, l’étranger est vite perçu comme un élément hostile et instable. L’intégration s’apparente à l’accès à une culture. Claude Raffestin parle de l’hospitalité comme d’un élément syntaxique qui met en relation des mondes opposés.

Elle se fonde sur l’idée que l’homme est lié à l’autre. En effet, chacun peut devenir tour à tour celui qui reçoit, comme celui qui est reçu. D’ailleurs, les peuples qui sont aujourd’hui épargnés par la migration restent des réfugiés potentiels. L’hospitalité, qu’elle soit offerte à un inconnu ou à une personne de son entourage, diffère. Recevoir un membre de sa famille ou un ami n’a jamais posé de problèmes majeurs. Par contre, l’accueil d’un inconnu génère beaucoup plus de méfiance et de tensions. La maladie et les malédictions sont assimilées à la venue des étrangers dans les murs de la ville. Mêmes les lieux qui les accueillent sont considérés comme malsains et dangereux. Autrefois, les juifs construisaient des auberges aux portes des villes pour accueillir leurs pairs.

Les rites anciens de l’hospitalité ont laissé des traces. Les centres d’accueil inspirent toujours une plus grande méfiance et la simple perspective d’en ouvrir un provoque des larges contestations au sein de la population. Chacun propose de bâtir plus loin, dans un autre lieu. Dans les villages d’hier, les étrangers étaient souvent recrutés pour défricher les forêts. Là aussi les pratiques ancestrales ont laissé leurs empreintes. Les clandestins de notre époque se chargent bien souvent des tâches les plus ingrates dans la plus grande discrétion.

La plus grande mobilité et l’augmentation des populations influencent les comportement face aux nouveaux arrivants. Aujourd’hui, les réfugiés représentent 2% de la population mondiale selon le Haut Commissariat aux Réfugiés. Les villes sont bien souvent confrontées au même pourcentage de sans domicile fixe. Pour Claude Raffestin, l’hospitalité est aussi celle que l’on offre aux sans-abri. Cette partie de la population citadine est actuellement confinée dans les périphéries, abandonnée à son sort. Les exclus du monde du travail sont obligés de survivre dans le nomadisme urbain à la recherche quotidienne de nourriture et d’un toit temporaire où les structures d’accueil apparaissent comme des archipels. L’identité de la personne n’est plus fournie par le politique mais par l’économique. Celui qui travaille est reconnu au sein d’une cité devenue économique.

L’orateur préconise le retour à une hospitalité qui tisserait des liens entre ceux qui sont exclus et ceux qui sont intégrés. Mais pour atteindre ce but, certaines dimensions doivent être repensées. La notion de don devrait être prise en compte, car elle a l’avantage d’engendrer des relations entre les êtres. La société, rappelle Claude Raffestin, ne peut pas reposer que sur la seule dimension économique.

§« Droits civiques, naturalisation et laïcité, clés de l’intégration » est le thème de la prochaine conférence le mercredi 22 janvier à 18h15 BFSH1 salle 263 à l’Université de Lausanne.