A Berne, Monsieur « Liberté religieuse » défend les minorités et les condamnés à mort pour blasphème

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A Berne, Monsieur « Liberté religieuse » défend les minorités et les condamnés à mort pour blasphème

15 novembre 2002
La diplomatie helvétique défend le respect des Droits humains fondamentaux aux quatre coins du monde
Parmi la dizaine de collaborateurs impliqués dans cette tâche, l'un d'eux est en charge du dossier « Liberté religieuse ». Simon Ammann déplore la recrudescence des violations dans le domaine depuis le 11 septembre. Portrait.

Au Département fédéral des affaires étrangères à Berne, Monsieur « Liberté religieuse » porte un nom ! Simon Ammann ! Loin de consacrer l’essentiel de son temps au saut à ski (!), ce fonctionnaire dans la trentaine, rattaché à la section « Politique des droits de l’homme », n’hésite pas à voltiger entre la vingtaine de pays dont il s’occupe et quelques dossiers importants comme celui de la liberté religieuse dans le monde.

D’abord journaliste en Egypte pour le compte du Bund de Berne, Simon Ammann a ensuite travaillé pendant 3 ans pour Amnesty International, avant de rejoindre voilà une année la dizaine de personnes qui composent la section « Politique des droits de l’homme » au Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). De son engagement militant, Simon Ammann conserve, posé sur l’écran de son ordinateur, un symbole fort : une bougie sur laquelle on peut lire en toutes sortes de langues : « Liberté ». Son souci du respect des Droits humains, Simon Ammann le fait remonter aux nombreux voyages qu’il a entrepris durant sa jeunesse. « Pendant ces voyages, explique-t-il, j’ai rencontré de nombreuses personnes victimes de violations dans le domaine de la liberté d’expression. Ces différents contacts ont été décisifs dans mon engagement ».

§Rien d'un gratte-papierDans le bureau de Simon Ammann, des cartes postales et des cartes de vœux égaient les portes d’armoires un peu mornes. « Vielen Dank ! » proclame l’une d’elles. « Je ne suis pas qu’un fonctionnaire qui rédige et prépare des dossiers, explique Simon Ammann. Souvent des personnes viennent nous voir pour nous demander de défendre la liberté de conscience de tel ou tel groupe ou de telle ou telle personne ». Des Baha’i, des membres du mouvement religieux Falungong ou des représentants d’ONG chrétiennes comme l’Aide aux Eglises martyres viennent frapper à la porte de Simon Ammann. M. « Liberté religieuse » reçoit aussi des proches d’individus menacés dans leur intégrité physique. Simon Ammann suit actuellement de près la situation d’un condamné à mort pour blasphème dans un pays musulman. « Les autorités de ce pays, ajoute-t-il avec un sourire de satisfaction, ont déjà annoncé que cette personne ne serait pas exécutée ! »

Dans le cahier des charges de M. « Liberté religieuse », figure aussi la préparation de dossiers pour les différents conseillers fédéraux qui voyagent à l’étranger. Il y a peu, Joseph Deiss s’est rendu dans la République islamique d’Iran, un pays avec lequel la Suisse entretient de « bonnes relations » et un « dialogue ouvert et critique sur le respect des droits humains ». Il emmenait dans ses bagages une prise de position sur les questions de liberté d’expression et de religion, forte de 3 volets. Le premier touchait à la peine de mort pratiquée dans ce pays. Les deux autres avaient trait aux châtiments corporels et aux entraves à la liberté de minorités religieuses comme les baha’i. « Nous rappelons systématiquement à de tels gouvernements, explique Simon Ammann, qu’ils ont ratifié des déclarations internationales dans le domaine de la liberté de conscience et qu’ils doivent par conséquent appliquer concrètement ces dispositions dans leur pays ».

« Depuis l’entrée de la Suisse à l’ONU, notre travail a beaucoup changé », relève Simon Ammann. La Suisse ne peut plus afficher une attitude d’attente sur son strapontin. Elle doit voter lors de l’Assemblée générale des Nations unies tout comme à la Commission des droits de l’homme. « Nous devons donc arrêter, en interne ici à Berne, nos positions sur toutes sortes de sujets, mais aussi négocier avec d’autres pays le contenu de résolutions que nous allons soutenir. »

§Libertés fondamentales toujours plus menacéesEn matière de développement des libertés religieuses dans le monde, Simon Ammann ne se montre « pas très optimiste ». « Il faut toujours lutter d’arrache-pied pour le respect de ces libertés fondamentales », constate-t-il. Depuis le 11 septembre, M. « Liberté religieuse » de la diplomatie helvétique considère même que la situation s’est péjorée. En élaborant des lois antiterroristes, la Russie, l’Inde ou même des pays européens ont saisi l’occasion de réprimer davantage encore des peuples ou des individus qu’ils avaient déjà en ligne de mire.

Même s’il est pessimiste qau sujet de l’accroissement de la liberté religieuse dans le monde, Simon Ammann aime néanmoins rappeler un succès qui a marqué sa première année au Département fédéral des affaires étrangères. Après plus de 30 ans d’emprisonnement, un prisonnier politique tibétain, Takna Jigme Sangpo, a été libéré par le gouvernement chinois. « L’intervention conjointe des Etats-Unis, de l’Union européenne et de la Suisse a permis la libération de ce prisonnier d’opinion et sa venue en Suisse pour y suivre des traitements médicaux », note-t-il non sans un brin de satisfaction dans la voix.