Le rabbin François Garaï au Café théologique de Lausanne :"Je veux croire à l'utopie de Jérusalem, ville de paix multiple"

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Le rabbin François Garaï au Café théologique de Lausanne :"Je veux croire à l'utopie de Jérusalem, ville de paix multiple"

1 novembre 2002
Y a-t-il une terre sainte ? C’est à cette question d’actualité que le rabbin François Garaï, de la Communauté israélite libérale de Genève, a été invité à répondre lors d dernier Théo-café qui a fait salle comble dans un bistrot lausannois
« Ce n’est pas la terre qui sanctifie l’homme, mais l’homme qui sanctifie la terre ». Pour François Garaï, il ne peut y avoir de territoires plus saints que d’autres. Il préfère parler de terre de sainteté, ce qui permet de changer de perspective : ce n’est pas le lieu qu rend sain mais l’homme qui accomplit un travail intérieur vers la sainteté dans un endroit chargé de sens. « La Parole divine est universelle et ne peut être liée à une appartenance nationale ».

François Garaï a précisé que Canaan n’est pas le lieu de naissance des premiers prophètes juifs : Ni Moïse, ni Ezéchiel, prophète en Babylonie où son peuple avait été déporté, ni Abraham, le Père des croyants, ni Jacob ne sont nés en Israël. Ce n’est pas en terre promise, mais sur le Mont Sinaï, en plein désert, que les dix commandements ont été donnés à Moïse.

Ce courant de pensée libéral, que François Garaï représente, a bien entendu son exact contraire dans d’autres milieux israélites plus orthodoxes pour qui Dieu a la possibilité d’assigner des territoires à qui Il le désire. Il a en effet appelé Abraham à quitter le pays où il vivait pour aller dans le pays de Canaan qu’il lui destinait, ainsi qu’à tous ses descendants.De ce fait, la terre d’Israël devient le lieu de délivrance de toutes les servitudes endurées, passées et présentes, et Jérusalem le lieu central de la pensée juive et du culte sacrificiel.

François Garaï relève qu’en hébreu, on ne dit pas « la ville sainte » pour désigner Jérusalem, mais bien « la ville de la sainteté ». Cette dénomination permet de changer de regard : « Ce n’est pas parce que je me trouve dans un lieu saint que j’accède automatiquement à un état de sainteté, mais uniquement par mon propre travail intérieur, favorisé par le lieu imprégné d’ une longue histoire, celle de l’unicité divine ».

François Garaï n’oublie pas qu’Israël est la terre de ses ancêtres depuis plus de vingt siècles, que son existence est toujours niée par tous les pays arabes. C’est devenu le lieu d’inextricables réalités historiques, politiques et idéologiques. Le jeu politique du début du 20e siècle entre les pays de l’ouest et de l’est, ont jeté de l’huile sur le feu, attisant les haines. La situation qui a tourné au conflit ouvert n’empêche pas François Garaï d’espérer que Jérusalem deviendra un jour un lieu de paix multiple. « Cette utopie-là me forcera à aller vers l’autre ! » a-t-il conclu sous les applaudissements.