Un cours public pour en finir avec la domination hommes-femmes

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Un cours public pour en finir avec la domination hommes-femmes

5 avril 2002
« Hommes et femmes : peut-on sortir de la domination ? », le titre du prochain cours public qui se donne à la Faculté de théologie de Lausanne oblige les théologiens à en découdre avec ce constat dérangeant : le christianisme, comme réalité historique, a plus souvent été du côté des conservateurs
Peut-il aujourd’hui encore être une force de propositions pour renouveler les rapports hommes femmes ? Cinq conférenciers vont tenter d’y répondre.

En invitant une historienne et une anthropologue françaises à confronter avec des théologiens, éthicien et exégète leur point de vue sur la domination hommes femmes, la Faculté de théologie de l’Université de Lausanne a délibérément choisi une thématique à vif : « Nous avons privilégié des coups de sonde stimulants et provocants » admet le professeur Denis Müller, l’un des organisateurs de ce cours public qui commence le 17 avril prochain à Dorigny. Selon lui, le féminisme a passé au second plan, au profit des études genre (recherches autour de ce qui est propre au masculin et au féminin), dès lors, « quelle peut être la contribution de la foi chrétienne et de la théologie dans ces transformations qui habitent aujourd’hui les relations entre hommes et femmes ? » se demande le professeur d’éthique.

Cinq conférences sont prévues pour tenter d’apporter un éclairage. « Mais n’allez pas en déduire que nous avons découvert les études genres cette année seulement , précise Thomas Römer, le doyen de la Faculté de théologie, elles sont enseignées aux Universités de Genève et Lausanne depuis un petit nombre d’années ». Un fait qui éclaire par ailleurs le taux de féminisation des études de théologie, la Faculté de Lausanne accueillant entre 30 et 40 % d’étudiantes.

§Un malaiseLes conférences et discussions du cours public parviendront-elles à dissiper le malaise que le monothéisme cultive face à l’univers féminin ? Thomas Römer, par ailleurs exégète de l’Ancien Testament, reste prudent : « dans la construction du monothéisme dans la Bible, l’éviction du féminin correspond au moment où on balaye le système des divinités, masculines et féminines, pour n’affirmer qu’un seul Dieu. Le féminin disparaît avec la diversité ». D’autre part, on ne peut se contenter d’accuser de machisme les rédacteurs de l’Ancien Testament, alors qu’ils n’ont fait qu’emprunter des images significatives. Un Dieu comparé à un berger, à un roi, renvoie à un discours marqué par la culture patriarcale du peuple hébreu. Pour Thomas Römer, l’enquête historique s’impose avant de se lancer dans une polémique sur les rôles dominant, dominé. L’antiféminisme chrétien, dénoncé notamment par l’historien français Guy Bechtel (cf. encadré), n’est d’ailleurs pas la seule cause de la déstabilisation de la culture chrétienne, selon Thomas Römer. Certes les Eglises ont largement exclu les femmes et tenu un discours réductionniste à leur sujet. Pourtant l’intérêt pour le religieux et les expériences spirituelles reste vif aujourd’hui, comme le constate le doyen de la Faculté.

§Des ressources ?Pourtant on peut se demander si réellement le christianisme, qui a souvent secrété des positions très conservatrices sur les rapports hommes femmes, dispose de ressources pour évoluer sur la question. « A priori, il y a un potentiel pour inventer un nouveau discours, affirme Thomas Römer, sachant que nous n’avons que des images provisoires pour dire Dieu, pourquoi ne pas renforcer les évocations féminines, telles celles que l’on trouve chez le prophète Esaïe qui parle de Dieu comme d’une femme qui accouche, qui souffre pour son peuple ? » . Cela suffira-t-il à évacuer les réflexes de domination ?